mardi 24 mars 2009

Inquiétude & Certitudes - mardi 24 mars 2009


Mardi 24 Mars 2009


Prier… chaque mois, ils porteront des fruits nouveaux. Conclusion en forme de promesse d’une sorte d’initiation d’Ezéchiel à qui un inconnu fait arpenter l’extérieur du Temple dont il sort de l’eau, de plus en plus abondante : As-tu vu, fils d’homme ? Naturellement, l’Eglise peut y voir son image : cela la fait-elle, cela nous fait-il nous interroger sur notre fécondité ? Au bord de la piscine de Bézatha, Jésus donne la réponse : le rite est d’aller se baigner avant les autres, à un signal. Le Christ s’en passe. Il commence, comme avec Ezéchiel, partant de nos sens et de notre situation propre : Est-ce que tu veux retrouver la santé ? Quelle question ! L’autre répond par le rite et fait constater à Jésus son indigence. Lève-toi, prends ton brancard et marche. La scène et la guérison ne sont pas un « copier-coller », il y a plusieurs rencontres entre le Christ et le miraculé, celui-ci est interrogé et suspecté comme l’aveugle-né, les tenants du rite, de l’établissement, les hiérarchies n’en démordent pas, l’économie de monopole dans la vie sociale et dans la vie spirituelle… Jésus avait certainement remarqué cet homme, le voyant couché là et apprenant qu’il était dans cet état depuis longtemps. Comment et pourquoi le remarque-t-il parmi la foule des malades et de leurs accompagnants ? Le regard du Christ sur nos foules, son enquête apparente, qui connaît ce qu’il y a au fond du cœur de l’homme. Le paralytique brille par son isolement, non par sa foi, dont il ne proteste pas même dans son dialogue avec Dieu. Mais il est aussitôt solidaire, il porte son brancard, transgresse un interdit et renvoie la chose à Celui qui l’a guéri, tout en ignorant complètement qui Il est. Pour se faire « pardonner », l’évangéliste veut noter que le pauvre homme était un pécheur et – est-ce l’esprit de l’époque – le péché entraîne toujours quelque maladie ou indigence matérielle ou pratique. Jésus est resté à « ras de terre » et raisonne, fait raisonner comme ses contemporains en ont l’usage, à ceci près que les règles posées ont perdu leur sens, puisqu’Il est là, parmi nous. En tout lieu où parviendra le torrent. [1]

matin

Thierry Morin recevrait 3,2 millions d’euros pour prix de son départ occasionné par son sens social et ses flairs stratégiques. Le gouvernement compte s’y opposer, étant au conseil d’administration… soit, mais c’est Libé. qui a accroché le grelot, l’Etat n’était-il pas au conseil où la prébende a été accordée ?

La crédibilité de toutes les politiques de relance en France se joue pour Euliez dans les Deux-Sèvres. Il ne faut que dix millions, ils sont refusés par le Fonds stratégique de l’investissement. Mille emplois. – Ce soir, discours dont il est communiqué qu’il sera sans annonces particulières et pas non plus « fondateur » : Nicolas Sarkozy défend « son » plan de réponse à la crise à Saint-Quentin…

François Fillon aux Etats-Unis, reçu par le vice-président, prépare censément le G 20 de Londres, et comme le réclame son maître détesté (de lui), il veut des résultats concrets. Les Etats-Unis veulent une politique de relance plus substantielle en Europe et les Européens veulent une régulation mondiale des finances et de leurs circuits. Les deux groupes ont raison, mais leur lacune commune est de ne pas encore raisonner sur la mondialisation et un protectionnisme négocié entre zones, chacune homogène. Reste que le Premier ministre a des notions d’économie, ce qui n’est pas le fort de Nicolas Sarkozy.

J’écris à « Matignon » en ayant commencé de lire les débats sur l’OTAN à l’Assemblée nationale. Ils sont dominés par un gouvernement jouant doublement en défense. D’une part, François Fillon n’est pas intimement convaincu que notre retour dans l’OTAN soit une bonne chose, et d’autre part, l’argumentaire continue de tourner sur « la démocratie irréprochable » c’est-à-dire sur le seul fait de consulter le Parlement, à quoi n’auraient pas recouru les prédécesseurs.

1° j'entends les commentaires sur le voyage du Premier ministre aux Etats-Unis (trouvant moi-même fort bien qu'il y aille et qu'il soit reçu par qui il est reçu) et l'entends lui-même en quelques phrases. Manifestement, il comprend mieux l'économie que le Président et son équipe, sans doute plus discrète, est efficace. Je vous en félicite chacun. Oui, l'endettement excessif - ménages, entreprises, collectivités, Etats - est à la racine de la crise en ce qu'elle a de mécanique. Le remède n'est évidemment pas d'augmenter encore l'endettement, mais ce que j'entends par relance par la consommation est une augmentation des ressources des ménages, donc une nouvelle répartition des ressources nées de l'investissement et de l'activité d'entreprise. Reste l'analyse de fond : la violation des valeurs premières, la crise est éthique, parce qu'il y a eu un mépris des autres, il y a eu priorité chez les dirigeants d'entreprises et de banques : l'enrichissement personnel avant même la préoccupation des meilleures stratégies d'entreprises; j'ai toujoyus été frappé par la lucidité des débats en comités d'entreprises, de la part des représentants des salariés, connaissant bien mieux la boîte que les dirigeants.

2° je lis les débats du 17 mars à l'Assemblée nationale. La première phrase du Premier ministre m'étonne : c'est la première fois que sous la Vème République le Parlement est amené à se prononcer sur la prolongation des opérations militaires à l'extérieur. Précisément, il n'y avait pas d'opérations extérieures pérennes avant 1995... et celles de Yougoslavie n'ont pas duré autant que dure déjà notre embourbement en Afghanistan. Nous ne faisons que suivre les Américains qui décideront leur propre départ (Barack Obama avant-hier) quand nous en serons encore à larmoyer de compassion pour justifier des envois nouveaux de troupe.

Mais où je veux en venbir, c'est que de Gaulle faisait tout le contraire : il fit décider - et par le peuple - la fin des engagements extérieurs (les accords d'Evian approuvés par referendum) - il critiqua ensuite tous les engagements extérieurs des "autres" : le Vietnam, la guerre des Six-Jours.

Il reste que, pour moi, à lire François Fillon dans son livre pré-électoral, il n'était pas en son for intérieur d'accord avec la décision qu'il a eu, ces jours-ci, à défendre devant l'Assemblée. Je lirai avec intérêt dans quelques années ? ou mois ? le récit de ses entretiens avec le Président.

La Fance peut supporter la vérité (Octobre 2006 . 268 pages) pp. 252-253 : Les tentatives françaises pour européaniser l’OTAN se sont toutes soldées par d’humiliantes fins de non-recevoir de l’administration américaine. On se souvient de la requête raisonnable de Jacques Chirac : il demandait que le commandement sud de l’Alliance atlantique soit confié à un Européen. La réponse américaine fut sans ambiguïté : « Ce commandement ne saurait être exércé que par un officier amérixcain en raison des intérêts de Washington en Méditerranée et de l’importance des forces américaines qui y sont stationnées. » En clair, les Etats-Unis n’accepteront jamais qu’une partie significative de leurs forces soit placée sous un commandement allié ! Dont acte. Plutôt que nier la réalité et de poursuivre l’édification d’une politique de sécurité et de défense européenne qui s’effondrera à la première difficulté avec nos alliés américains, mieux vaut en prendre acte et chercher à constituer un ôle plus solide avec ceux qui partagent notre souci d’indépendance. Cette stratégie est d’autant plus nécessaire que la puissance américane n’est pas éternelle, qu’elle est fragile et qu’elle repose sur une économie en déséquilibre.

Réunion à Istanbul sur l’eau. Elle n’a pas de sens, les acteurs sont des gens comme Gérard Mestrallet, qui s’est retiré d’Amérique latine dès que les profits ont diminué et qui, dans ses rapports développement durable – que des décrets de Lionel Jospin en fin de mandat – obligent à annexer aux bilans, laisse un blanc sur le planisphère : l’Afrique ne préoccupe pas Suez… pas de sens non plus puisque les Etats-Unis ne veulent pas d’un droit à l’eau. Barack Obama sait-il cette position de son administration ?


soir

Les patrons sur la sellette. Les abus avaient commencé avec des seigneurs menant grand train : Pineau-Valenciennes, Suhard, des dictateurs dans leur entreprise et se servant copieusement des fonds et facilités de celle-ci. Même s’il fut impérial, je ne mets pas Le Floch-Prigent dans cette catégorie, car il menait ses boîtes, longtemps Elf puis la SNCF dans la puissance et dans le succès ; ce fut une erreur de le condamner, de l’emprisonner et surtout de donner l’empire à Total : un + un n’ont pas fait deux ni trois, mais à peine un, compte tenu du mouvement des autres qui a continué. Même observation pour Jean-Marie Messier : la France a alors perdu décisivement deux réseaux mondiaux. Mlais la quantité de roitelets qui mènent leur outil à la casse et les salariés à la rue, et les patrons de banque qui n’ont jamais fait de guichet ou de commercial, qui s’enrichissent en priorité et ne veillent sur rien, ni les évolutions de leur marché, ni les errements de leur métier. Ceux-là sont maintenant hués et désignés à la vindicte – démagogiquement il est vrai par un pouvoir poliique aussi profiteur, quant à lui, de sa propre rente de situation. Séquestration du patron de 3 M à Pithiviers. Les rémunérations des dirigeants, objet de X propositions de loi notamment des députés de la majorité, puisque Sarkozy a pris position… mais on ne va pas plus loin. Le partage des profits ? pour le moment, ce sont des pertes, on ne risque donc rien… mais, même ainsi, on ne légifèrera, éventuellement, qu’à l’automne. L’essentiel serait de régler le fonctionnement de l’entreprise et de donner aux salariés des pouvoirs juridiques égaux à ceux des actionnaires : un travail à approfondir, la propriété de l’entreprise à distinguer selon le capital et l’outil appartenant aux actionnaires, et les marchés, la notoriété, le carnet de commande étant à évaluer au profit des salariés. Le projet date du Général et de René Capitant : l’association capital-travail du début des années 1950. On n’a jamais fait plus audacieux avant ni depuis, en régime de libre concurrence.

Israël : Nettanyahou et les travaillistes. Ehoud Barack qui a manifestement le plus perdu les élections, garderait son portefeuille à la Défense, alors que ce fut lui qui avec Bill Clinton, ce dernier à quelques jours de la fin de son mandat, donnait le plus aux Palestiniens, pas seulement l’Etat promis depuis Oslo, mais du territoire. Le voici allié à l’extrême droite la plus hostile aux Palestiniens et sous la férule d’un Premier ministre qui ne veut pas de cet Etat, au mieux une autonomie modulée. Ehoud Olmert met en garde contre l’isolement d’Israël qui va forcément résulter d’un tel programme. La loi que le prédécesseur était mieux que l’actuel, se vérifie donc continûment à Jérusalem.

Madagascar – sur place, il apparaîtque tout est régulier, abdication du président mis en état de siège, au profit de l’armée, laquelle donne le pouvoir au jeune et populaire – un visage et un corps d’adolescent – maire de Tananarive. La Cour constitutionnelle valide et donne deux ans à la transition. Notre ambassadeur semble apprécier et le cours et le nouveau pouvoir, mais de partout ailleurs que sur place, c’est la condamnation, à commencer par l’Afrique australe que je sens de plus en plus instable, Afrique du sud comprise. Les Etats-Unis sont hostiles, la France se modère finalement, sans doute du fait de notre nouvel ambassadeur, précédemment directeur du cabinet à la Coopération et ayant une teinture des Nations Unies.

Mauritanie. Deux jours de gratte pour contribuer aux réflexions qui devraient conclure les « consultations » au titre de l’article 96 du traité de Cotonou. Le cynisme et le simplisme de la junte me sidèrent. Abdel Aziz gagnera évidemment les élections. Les interrogations immédiates sont nombreuses : l’unité d’action ou d’hostilité se fait entre le parti de mon cher Ahmed Ould Daddah et les légalistes du FNDD, mais les personnalités ne se rencontrent pas, mon amio, Messaoud Ould Boulkheir et Sidi Ould Cheikh Abdallahi dont les concessions depuis la fin de Janvier ont permis la conjonction actuelle. La caricature de médiation – mimée par Khadafi, dont le discours lu au premier degré a sa logique – a cristallisé ce qui aurait dû se produire depuis des mois. Mais y aura-t-il boycott absolu, c’est-à-dire la candidature unique et une majorité d’abstentions par rapport aux inscrits ?

Discours de Saint-Quentin : un commissaire du gouvernement par bassin d’emploi, illusion d’un bureau des pleurs, on l’a vu pour les banques qui ne prêtent pas plus qu’avant à qui que ce soit. Six Français sur dix veulent la poursuite des mouvements sociaux, François Fillon perd la majorité d’opinions positives, Nicolas Sarkozy se situe toujours entre 37 et 42% d’opinions positives…

Communiqué de Jacques Myard sur un discours ou un texte de Barack Obama : les Etats-Unis ne changent toujours pas, notre prétention à peser de l’intérieur de l’OTAN est sans aucun fondement. Relevé de texte : « Les Etats-Unis sont prêts à assumer leur leadership et nous appelons nos partenaires à se joindre à nous (...) » ou bien encore « (...) nos actions seront renforcées par les mesures complémentaires prises à l'étranger... ».

Gestion de la crise mondiale. Les Américains laissent aller leurs banques secondaires à la faillite, les Allemands adoptent une première loi de nationalisation. Désaccord général pour le G 20 de Londres. A Washington on jongle avec les centaines de milliards, secteur par secteur à soutenir ou à renflouer, et l’on presse les Européens d’en faire autant, mais qui prend le papier, les bons du Trésor et les obligations d’outre-Atlantique ; répartition entre l’Europe et la Chine, tandis que les Etats-Unis ne prennent rien de nous. Ma chère femme se demande ce que sont les « actifs toxiques » au bilan des banques, notamment françaises : des titres émis par des banques et des assurances américaines, refilant ainsi leurs créances immobilières aux particuliers, si douteuses depuis deux ou trois ans ? et plus… une titrisation maquillant la « traçabilité » des produits, donc leur liquidité à terme et qui serait la cause aussi bien de la défiance des banques entre elles, que de la dévalorisation des actifs.


[1] - Ezéchiel XLVII 1 à 12 passim ; psaume XLVI ; évangile selon saint Jean V 1 à 16

Aucun commentaire: