mercredi 25 mars 2009

la littérature éditoriale - ... ce que j'en écrivais, in mémoriam, en 1996

Editorialiste, bloc-noteur, le talent doit être exceptionnel. Donc François MAURIAC parce qu'il eût tous les genres, qu'il campait en politique l'empoisonneuse et faisait du Général un " amphibie de Dieu " ou bien était-ce plausible. Son " dans le doute, il faut choisir d'être fidèle " qui fut sa recommandation pour répondre au referendum sur lélection présidentielle au suffrage direct, est la maxime cardinale en morale et en spiritualité, elle est plus douteuse en politique, pétainiste davantage que gaulliste, mais elle frappe et demeure. La politique et le sacré, c'est Un adolescent d'autrefois qui la fonde ; il y faut la coincidence, en une même époque, des deux rôles. L'écrivain-journaliste ignorera presque totalement dans son plaidoyer interrogatif de vingt ans le grand écrivain qu'est aussi le grand politique, il ne voit l'éternité chez de GAULLE que dans la geste par excellence française, alors que l'ermite de Coleombey savait que l'avenir a ceci de commun avec la conjoncture qu'on les maîtrise tous deux par le verbe, et que le verbe ne s'improvise pas, que la boutade surtout ne peut naître que de la pratique du par-coeur dont, alors, on a joie à jaillir, parfois et à dessein. Je ne sais guère rapporter ce que j'observe des femmes, des personnages qui pourraient être de romans - trop à plat, trop en fonction de mes hantises ou de mes assimilations abusives à des modèles ou à des nostalgies, mais je sais voir le politique, sa chair, sa peur, son petit linge, la jubilation d'un Premier Ministre constamment roide, coincé, pire que froid, éteint ? ou étreint (mais de quoi ou par quoi ?), laquelle n'apparaît qu'en une seule situation, celle du propagandiste, harponnant l'adversaire par ses vêtements du passé. Alain JUPPE n'est pas un homme d'Etat, c'est un colleur d'affiche qui ne jouit que la voix cassée sous un préau, c'est-à-dire au niveau où il a été coopté, n'ayant jamais élu par lui-même : le Palais-Bourbon, les salles genre cinéma Gaumont où se tiennent toutes les applaudisseries des partis. J'ai su voir pour Georges POMPIDOU et Valéry GISCARD d'ESTAING, là où çà fait mal. Et ce qui me fait mal à moi, c'est l'exorbitant privilège de ces si ternes entreteneurs de l'opinion, chaque parution d'hebdomadaire, chaque colonne de gauche en première page de tant de journaux, ayant la radio, l'émission de télévision, d'autres éditoraux encore pour - par additions et défraiements - palper bien plus qu'un dirigeant d'entreprise ou de grande administration, et ont le monopole lucratif du commentaire. Si le débat s'est éteint depuis une vingtaine dannées en France, si les gouvernants sont nus devant les chocs de circonstances ou de nouveautés, si l'opinion n'est plus qu'une rumeur ou que le relevé des sondages, si la langue de bois est telle que nous ne sûmes rien penser de l'unification allemande (en réalité, l'absorption de la plus faible des deux Républiques d'après-guerre par la mieux placée géographiquement et démographiquement), pas davantage chercher la vérité dans les affaires du Golfe, et encore moins comprendre la logique économique qui fait le chômage, quelles que soient les primes et les non-primes, cela tient essentiellement à la pauvreté du journalisme politique, pauvreté contagieuse puisqu'il n'y a plus d'orateur politique, ni de politique vraiment politique. Un art s'est perdu qui est indispensable, mêlant imagination, interpellation, fronde et éternité, parfois tout exprimé en majuscule, parfois sans titre. Je propose ma copie en format " papier ", je la propose périodiquement en échantillon de feuilleton, quand les directions ou rédactions-en-chef, les propriétaires-mêmes changent, et je ne suis jamais adéquat, que ce soit, un mois de Janvier, Claude IMBERT, aimable et confiant, dans un clair-obscur de chambre de bonne à quoi l'on accède par escalier intérieur et murs punaisant les couvertures d'autres décennies ou Christine OCKRENT de passage en haut de l'avenue Hoche un mois de Novembre. Le discours est semblable et de plus, de nos jours, l'emploi est pourvu, le gagne-pain tenu ; ma prstation gratuite, ce ne serait pas dans les normes. Je suis condamné à lire les journaux et à ne plus les écrire. La politrique où je ne puis intervenu en pensée ou en élection, ne m'intéresse plus. Je suis devenu ce Français qui par millions soudain est au bout du défilé, place de la Nation, pour les merguez et un jour pour la surprise, et peut-être ce qui ressemble en énergie humaine le plus à la haine : l'exaspération. Reçu une première fois à l'Elysée par François MITTERRAND, je l'entends me demander, et non pas soliloquer ce que je pense de tous ces faux-c... de chrétiens de gauche, il vient de subir un petit déjeuner avec Edmond MAIRE et sans doute une discussion avec DELORS et ROCARD, je lui explique Le Monde de FAUVET, il a, sur la table de travail La Croix, donc mon dernier article. On ne vit pas cela deux fois, non parce que ce fdut une chance, mais parce que quinze ans, cela n'existe plus du tout, cela ne peut exister. L'homme qui meurt ne pense-t-il pas que ce sont les choses qui s'en vont. C'est ce que je pense, puisque Raymond ARON, André FRANCOIS-PONCET (qui fut si vite présenté comme le père du ministre !), Sirius, J.J.S.S. et Jean DANIEL des crises maghrébines n'existent plus de ce côté-ci de la feuille. Et moi pas davantage. J'ai donc grand mal à continuer, tandis que je suis une nouvelle fois en difficulté de carrière et donc chez moi, de tenir un journal politique. Le paysan à qui je prête mes petites terres pour qu'il y ait profit et que je ne sois pas en friche, raisonne mieux sur la spirale déflationniste que l'expert-comptable de Chateau-Gontier. MAURIAC, DAUDET, ARON, FRANCOIS-PONCET auraient su les faire dialoguer ; c'est comme cela d'aileurs, qu'à lui presque seul, notre ancien Ambassadeur près HITLER et MUSSOLINI maintint l'opinion atlantiste chez nous, ce qui ne pouvait que pousser les Etats-Unis à se découvrir et de GAULLE à trancher. La littérature éditoriale est ma frustration, c'est le seul genre auquel j'avais pu aboutir, presque du premier trait. L'exilé, s'il a conscience que le soleil le plus haut brille sur sa patrie, ne peut que souffrir de son éloignement, mais si le temps, il le sait, y est médiocre, alors il se console, quoiqu'avec amertume. Sous l'or terni d'une République maintenant trop mûre, notre Cinquième si sauvageonne au temps où de GAULLE pouvait dire à MALRAUX n'avoir que Tintin pour rival, ce sont les mauvais stucks des hotels particuliers que s'arrachent les cabinets ministériels d'aujourd'hui mais dont les tissus et papiers peints ont plus d'usure et de lamentable aspect que la salle d'attente d'un dentiste. Ma position ne me permet que les salles d'attente, je m'y connais donc, je ne fus reçu que quand l'or était frais, et moi également. Jacques CHIRAC a succédé à Henri QUEUILLE, c'est son siège. Or, l'article à faire que les précités n'auraient pas loupé, est bien celui-là, et s'il y avait quelque mémoire, on n'oserait conjecturer que le futur Président de la République ait pu rencontrer à l'Elysée celui qui venait de concocter, sous sa signature le plan RUEFF, attendu que cela se passa à Matignon et que le héros était au service militaire, en Algérie et " fana. mili. ". La culture... et l'oubli sont tous deux sélectifs. J'en suis donc réduit à écrire au passé composé, j'eusse voulu écrire toujours au présent et au futur. Là aussi, je suis donc Français.

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