mardi 18 janvier 2011

Inquiétude & Certitudes - mardi 18 janvier 2011


Mardi 18 Janvier 2011

Prier… semaine de prière pour l’unité des chrétiens ? autant vaut dire pour l’ensemble du genre humain, pour notre compréhension mutuelle de la démarche religieuse, de sa nécessité, des diversités des voies d’approche, même si – en réalité autant que par construction – la révélation de Dieu est forcément de contenu et d’aboutissement unique. Evidente nécessité dans la faillite des élites politiques et économiques et l’incapacité de celles-ci de dégager des autorités morales synthétisant et contrôlant des pratiques en vue du bien commun, que les religions, surtout les religions monothéistes, apprennent non à se connaître mais à prier ensemble. Marcher de conserve fait se dsécouvrir mutuellement, l’échange sur le dogme ou le rite avance presque moins que l’étude sociologique ou littéraire, mais la prière ensemble, dans le silence, introduit – je crois et l’ai éprouvé – à presque tout. Prier donc, bien au-delà de moi et de ce qu’il m’est donné de vivre et de ce dont j’ai la responsabilité [1] . Regarde ce qu’ils font le jour du sabbat ! Cela n’est pas permis. – Le sabbat a été fait pour l’homme, et non pas l’homme pour le sabbat. Voilà pourquoi le Fils de l’homme est maître, même du sabbat. La critique est prudemment adressée aux disciples, le Christ pris à témoin mais non pas accusé lui-même. Sans doute par respect, plus probablement parce que lui-même se plie au rite, tandis que ses disciples, chemin faisant, se mirent à arracher des épis. Réponse à la fois scripturaire et de pure logique, en défense de ses disciples. Mais l’essentiel vient enfin, pas tant la destination de tout rite, référence à Dieu ou pas, explicite ou pas : le Fils de l’homme est maître, et s’il l’est du rite, il l’est de tout. Et il l’est par nature, et par nature autant humaine que divine. Rejoint-on là cet établissement de l’homme à sa création ? et cette analyse du psaume sur la place de l’homme dans la hiérarchie universelle et spirituelle ? L’Ecriture porte à la contemplation, à la méditation, mais surtout à l’action, et la plus forte est l’espérance qui nous inscrit dans le temps, depuis nos besoins inassouvis et criants jusqu’à notre libération. Là encore Dieu, le Christ au centre. Pour notre âme, cette espérance est sûre et solide comme une ancre fixée au-delà du rideau du Temple (rideau qui se déchire au dernier souffle de Jésus en croix), dans le sanctuaire même où Jésus est entré pour nous en précurseur. Cet au-delà est décisif, il est à l’initiative du Christ et il périme tous nos différends religieux, moraux, politiques : Dieu et son salut sont au-delà, non pas « ailleurs » ou inacessibles, mais très simplement en dépassement de nos œuvres et manières, quoique dans nos constructions de tous ordres : au-delà du rideau du Temple, l’unité, celle de chacun intimement, celle de nous tous à travers toutes générations, toutes civilisations et en communion avec l’ensemble de la création.

Tunisie. Confirmations à tous les points de vue.

Dès ce matin, contestation dans la rue mais surtout dans les esprits – les circuits internet – du gouvernement d’ « union nationale ». Le communiqué du Premier ministre (de Ben Ali) pour justifier le maintien des principaux ministres (de Ben Ali) n’empêche pas trois ministres d’ « ouverture » de démissionner dès le communiqué de la principale centrale syndicale. Le mot de l’opposant – qu’on présente comme l’opposant « historique », arrivant de Londres et porté par ses partisans sur leurs épaules, comme Bourguiba en 1955 – le dictateur est renversé mais pas la dictature, est celui de la journée : je ne sais rien de ce Monceif Marzouki. Le seul fait qu’il s’était réfugié à Londres et non chez nous souligne la complicité de Paris. Michèle Alliot-Marie ne convainc pas en commission des Affaires étrangères, elle plaide seulement que ses propos n’ont pas été compris. Pourtant, elle a proposé mardi dernier un concours sécuritaire à Ben Ali et qui n’était pas seulement en matériel. Ayrault attaque très bien, accepte l’aveuglement de chacun des Etats partenaires et le réalisme de relations de beaucoup de pays comme le nôtre avec des dictatures, mais les soutenir comme nous avons proposé de le faire ? non. Fillon maintient sa confiance, n’évoque pas Sarkozy – le propos de celui-ci sur le progrès des libertés, propos de 2008 – et renvoit à des propos de Jospin en 1997 et de Strauss-Kahn, décoré à Tunis l’an dernier, pour conclure sur la Côte d’Ivoire où le PS soutiendrait Gbagbo (par Dumas ?) ce que je crois faux. – Il apparaît dès ce soir que le système se mettant en place n’est pas unanimement reçu, en tout cas pas des élites ni des émigrés en voie de revenir.

A propos de la Tunisie, le débat parlementaire et la manière dont François Fillon répond à l’opposition montre que le Premier ministre, s’il était « au pouvoir » sans personne « au-dessus » serait pire que Nicolas Sarkozy car il n’en commettrait pas les fautes, les outrances de langage, les lapsi – le record étant peut-être atteint ce soir : je suis en Allemagne, pour je suis en Alsace, articulé par une véritable marionnette, sa propre caricature. Mais sur le fond, François Fillon me semble en accord avec le président régnant. S’il y a à faire son florilège, ce serait dans ses contre-attaques. La manière est toujours la même : pas à se justifier sur l’actualité puisque naguère l’opposition fit de même… l’excuse suprême, je ne fais pas mieux que les autres ni pire. Alors revendiquer le pouvoir, « faire de la politique » ?

Le système de Sarkozy. Le reproche pratique : il n’a pas de résultat ni précaire ni durable. Seul « bon chiffre » depuis des mois, nos 860.000 naissances en 2010 et les 65 millions atteints pour la première fois dans notre existence nationale. Le reproche psychologique me détermine davantage : ce système infantilise aussi bien les Français conviés à tout croire sur parole, à accepter toute médication parce qu’administrée supérieurement, à se culpabiliser si la situation du pays et la leur ne s’améliorent pas, que les élites, amenées avec habileté, quelle que soit leur étiquette politique ou leur position sociale, à se croire supérieure à la majorité de ceux qui ne sont plus même considérés en compatriotes, et donc à se solidariser de fait avec le pouvoir régnant, au moins en méthode et en solitude face à des Français rétifs. Réflexe de supériorité qui est immature, et même raciste. Il y a ceux qui savent et comprennent, et puis tous les autres.

A un train excessif, des sujets traités dans la hâte et sans mise en perpsective. Pendant au Conseil constitutionnel, le mariage homosexuel. A l’Assemblée nationale, la garde à vue avec la discussion jamais close depuis qu’elle a été ouverte par Sarkozy en 2007 sur le rôle du parquet, évidemment soumis à la hiérarchie. En Conseil des ministres, bientôt, la réforme fiscale : l’alignement sur l’Allemagne permettant une augmentation massive de l’imposition sur le revenu et ce thème principal joué à l’européenne pour ne pas avouer qu’elle est d’abord budgétaire, masque l’abandon de l’impôt sur la fortune contrepartie du démantèlement du bouclier fiscal.
Je ne parviens toujours pas à croire que Sarkozy puisse être battu en 2012 : il a bien pu gouverner et continuer de s’imposer à son camp et à son électorat depuis le printemps de 2008 avec pas 40% d’opinions favorables. Sur le papier, il y a les vingt ou quinze points le séparant au second tour du candidat PS, mais je ne crois pas à cette défaite. En revanche que Marine Le Pen fasse au premier tour mieux que son père en 2002 me paraît probable.

[1] - lettre aux Hébreux VI 10 à 20 ; psaume CXI ; évangile selon saint Marc II 23 à 28

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