samedi 26 mars 2011

Inquiétude & Certitudes - samedi 26 mars 2011

Samedi 26 Mars 2011

Et prier…
[1] réflexe du Christ qui s’impatiente, surentouré, pressé : les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre… Ce n’est pas, je crois, à lire en termes de péché ou de bonnes actions, mais d’un clivage social selon une société théocratique. Nous reproduisons le même modèle, les échelles de valeur dominantes discriminant tout : pour notre époque, l’argent permettant le paraître et la satisfaction de toute volonté de puissance. Dans mon enfance, le clivage existait, mais non dit : la beauté et l’intelligence, l’un ou l’autre ou les deux, cela se voyait aussi dans ce qui était modélisé, l’héroisme des temps de guerre, des beautés de cinéma, mais entre enfants, les clivages n’en étaient pas, il n’y avait que des personnes, c’est entre adultes que l’on s’agace, entre enfants, il y a les attirances, pas les détestations. Jésus vit les deux : attirance et détestation, esprit d’enfance, esprit racorni de l’adulte se jugeant en droit. Il se contient et donne une leçon, très narrative, le don de conteur de celui qui voit et qui écoute. Voit et écoute l’humanité. Paradoxalement, le personnage de réflexion est le cadet, « le fils prodigue » : donne-moi la part d’héritage qui me revient… il réfléchit… Il est sordide, mais il est aimé et regretté. Car il sait rentrer aussi en lui-même. Je ne mérite plus d’être appelé ton fils. Il a des références : j’ai péché contre le ciel et contre toi. Il est très construit et sa conduite est entière, il part en prodigue, il revient avec autant de force et de détermination qu’il est parti. Le père n’est qu’amour et bonté. Plus que l’Ancien Testament, le Nouveau, les évangiles attestent sans cesse la pitié de Dieu, la pitié du Christ : comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de pitié. Il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers. L’aîné, homme de devoir, de rectitude, scribe et pharisien chacun est visé par ce portrait esquissé, n’a pas de cœur, il n’aime ni son frère, évidemment, ni son père. Un père qui le supplie et qui lui dit : toi, mon enfant alors qu’au revenant, il ne répond que par l’accueil, les égards, les baisers, pas de texte. Conclusion de l’Ancien Testament : tu ne t’obstines pas dans ta colère, mais tu prends plaisir à faire grâce. De nouveau, tu nous montres ta tendresse, tu triomphes de nos pécéhs, tu jettes toutes nos fautes au fond de la mer ! Indication déjà de la rédemption, cette œuvre sur nous-mêmes, de triompher de notre faiblesse native et de la tentation, des fautes et péchés, c’est Dieu qui s’en charge. Il est tout simplement efficace : il n’est pas pour toujours en procès, ne maintient pas sans fin ses reproches, il n’agit pas envers nous selon nos fautes, ne nous rend pas selon nos offenses.

matin

Les insurgés ou les rebelles libyens – on ne sait comment écrire, car les forces de Kadhafi sont dites loyalistes semblent remporter leurs premiers succès militaires en reprenant deux villes qui peuvent commander les routes vers Benghazi ; mais le front politique ou diplomatique – qui est double, relations interalliées et relations avec le personnage dont on veut se débarrasser – est trouble. Cessez-le-feu, porte de sortie, dialogues, tout cela signifie que Kadhafi resterait en place. Ce dernier a un sens de la propagande que multiplie son cynisme : les boucliers humains évidemment, entassés dans sa caserne, ppur opérer le chantage aux victimes civils dont la protection est l’objet littéral de la résolution 1973.

BHL… sans doute à l’origine de notre engagement pour les rebelles libyens de Benghazi, mais avec comme point d’appui dans la psyché de Sarkozy la nécessité pour ce dernier d’effacer les images de l’automne de 2007. Je connais un peu l’homme à ses origines, nos repas à l’automne de 1976 puis un an ou deux plus tard, la rencontre fortuite à l’Astir-Vouliagmeni. Le personne, très affecté et construit, dont je crois n’avoir jamais rien lu puisque je l’avais entendu m’expliquer son projet (le livre s’appelait encore La philosophie dans tous ses états, et le titre qui fit la vente et la date n’était pas encore trouvé) et que je l’ai écouté en conférence, puis vu-entendu à la télévision ( le FPÖ de Haider, et l’Autriche chroniquement taxée de nazisme). L’ensemble fait toc, mais je reconnais que souvent il met ses introductions au service de causes belles, parce que directement humaines, idéologique seulement au énième degré : c’est donc bien.

Reste cette émergence – signe de plus de nos décadences et indigences – d’une profession ou d’un rôle : ceux d’intellectuel, label déposé. Une grosse dizaine qu’on voti et qu’on lit partout, nostalgiques de Sartre, Malraux, voire Bernanos, Montherlant. Liste faisant sentir la différence, décisive en matière d’autorité morale : il manque aux intellectuels d’aujourd’hui tout simplement le talent d’écrivain ou d’orateur, celui du romancier qui n’entre en politique qu’occasionnellement mais souverainement parce qu’il n’en vit pas, qui ne prêche pas l’intelligence et qui est seulement intelligent. – Alors… les déjeuners d’intellectuels à l’Elysée. Et ces actualisations, d’une part, des Edgar Morin ou des Bourdieu, voire Paul Ricoeur ont des disciples, des étudiants, mais pas de public chez les politiques, et d’autre part, s’il y avait de génération en génération ce rôle (bouffon ? au grand sens du terme, qui n’est pas un faiseur de rire ou de dérision, mais un faiseur de réflexion, de retour à la réflexion) d’intellectuel, la caricature était celle de l’intellectuel (forcément) de gauche. Aujourd’hui, ces intellectuels si tolérants envers le pouvoir en place sont de droite, mais ce n’est pas péjoratif, comme l’était la qualification de gauche, il y a quarante-cinquante ans.

[1] - Michée VII 14 à 20 ; psaume CIII ; évangile selon saint Luc XV 1 à 32

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