lundi 15 août 2011

Inquiétude & Certitudes - lundi 15 août 2011



Lundi 15 Août 2011

Prier…
[1] la Vierge Marie, absente des épîtres apostoliques, est l’héroïne de saint Luc, le médecin. Paul ne l’évoque jamais, sauf erreur, Pierre a sa belle-mère remise d’aplomb par Jésus, Jean qui lui est confié et à qui elle est confiée ne l’évoque pourtant pas dans ses épîtres, il est vrai très peu biographiques. Cette solennité – évoquant une déduction toute logique mais que ne rapporte aucun texte – est par excellence celle de la foi : Pie XII l’avait, en même temps qu’une dévotion mariale plus mystique qu’affective, cette dernière dimension, celle de Jean Paul II par excellence. Le Magnificat anticipation de la totalité d’un parcours, aboutissant à l’Assomption (fait unique, Elie et Enoch enlevés vivants, le Christ ressuscité d’entre les morts, la Vierge seulement endormie…) : il s’est penché sur son humble servante. Marie répond ainsi à sa cousine qui vient d’ajouter à la salutation de l’ange et nous enseigne une part du Je vous salue Marie… Tu es bénie entre toutes les femmes et le fruit de tes entrailles est béni. Liée à son fils, son Fils dès la conception de Celui-ci. La Genèse la prédisant, l’Apocalypse la couronnant, selon la lecture que – dans la foi et selon l’Eglise, le cheminement de notre « tradition » - nous faisons de l’Ecriture. Grâce au fiat d’une femme, d’une fille de chez nous… le dernier ennemi qu’il détruira, c’est la mort, car il tout mis sous ses pieds. … Un signe gradiose apparut dans le ciel : une femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. Jean à Patmos, au soir de sa vie, bien loin du jeune bien-aimé du maître, devenu si mystique, nous fait longer le mystère comme on monte à la « chora » de l’île et pouvons tourner autour du moanstère et de ses remparts, au sommet… cette mise au monde… ce dragon devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer l’enfant dès sa naissance … Jean ne fait pas durer le suspense et abat les cartes, tout serait trop difficile à comprendre et à voir dans ce livre, s’il n’y avait ses incises, si fortes et si claires, tonnantes (comme lui) : voici maintenant le salut, la puissance et la royauté de notre Dieu, et le pouvoir de son Christ. J’ajoute, humblement, entre folie et pauvreté qui me guettent et m’étreignent : alleluia et prie avec toutes femmes, toutes jeunes filles, toutes accouchées, avec celles aussi qui ont reçu ce beau prénom, mes cinq sœurs, deux de nos nièces, tant d’amies. Humanité consacrée… tant de sanctuaires, tant de misères déversées et d’espérance, au moins. Alleluia… sainte Marie, mère de Dieu, priez pour nous pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort ! Maintenant !

La messe célébrée par le Père Bernard. Blanc sur noir, l’hostie presque transparente de blancheur se détachant sur le visage parfait de l’Africain. Nos teints de soi-disant « blancs » sont si moches pour la plupart d’entre nous, du rosâtre ou couperosé au blanc malsain ou boutonneux, nous ambitionnons le bistre, le bronzé aujourd’hui, avant-hier c’était le blanc du lait… rares sont nos belles peaux. L’éclat… Deux femmes d’un certain âge parlent entre elles, sur le chemin de retour chez elles, de cette liturgie. L’une se plaint de ne pas tout comprendre de cette façon de français, l’autre avance son gendre de l’Aveyron qui prononce toutes les voyelles. Comme elle est parisienne, je lui dis qu’on nous reproche notre accent pointu et qu’à Carcassonne, chez mon grand-père, au temps des opératrices au téléphone, je me fis reprendre : vous ne pourriez pas parler français comme tout le monde. – Les missionnaires, malgré « tout » et grâce à l’Esprit saint, propagèrent quelque chose, même venus d’ailleurs et d’une autre race et d’une autre histoire. La France et ses prêtres africains, maintenant. Evidence que si d’un continent ou d’un pays à l’autre, les clergés, les célébrants s’interchangeaient, d’une part la liturgie s’enrichirait fantastiquement, invention, réaction, demande, réponse (l’Afrique noire, le Brésil pour autant que je le sache, la Russie catholique qui vient forcément de l’orthodoxie… telles qu’il m’a été donné de l’expérimenter), mais plus important encore : il y aurait communion sur les vrais problèmes de notre temps, un Congolais quand il parle de guerres ou de massacres, il en vit… la famine, ce n’est pas qu’en Somalie, mais du coup il peut évoquer la Somalie : en matière de pauvreté, il est crédible… Et puis, la grâce étrange de cette fête mariale, en fait de toute dévotion mariale, les richesses reprises et magnifiées : femme, beauté, fille, mère, épouse, c’est beaucoup, mais plus encore, il y a un consentement – je l’ai ressenti à cette messe – à une ferveur ensemble. L’appétit ou le besoin de tendresse, d’accueil, c’est un lent cri commun, inaudible. Sans doute, à dresser l’oreille (du coeur), est-ce celui de toute l’humanité. Marie ne pouvait s’inventer, tous les mythes du féminin et de la déesse sont très inférieurs à la réalité qu’aperçoit notre foi et que donne l’Ecriture. La Bible, mais pas très loin : le Coran.
L’assistance était autre… assez de composition, beaucoup de comportement. A la messe de plus en plus, les familles, jeune couple, jeunes enfants, me bouleversent d’admiration et de tendresse. Les modalités peuvent se discuter, et beaucoup… mais l’Eglise, notre Eglise, les croyants, ont raison de défendre et propager la famille. La société, la politique, la fiscalité, la sécurité civile sont les résultantes de familles vraies, réalistes, charnelles, aimantes, responsables. Notre fille de six ans et demi, qui me manque tant pendant qu’elle est en vacances alsaciennes, sait manifester qu’elle est responsable, d’elle-même : combien de soirs où elle se dit expressément pas contente d’elle-même (à quoi je lui réponds : pas de culpabilité, mais joie de la prière et du pardon assuré , et nous partageons "bêtises", impatiences, distraction, inattention surtout de moi pour elle, pas brillants, moi à genoux, et elle tranquillement assise, parfois la médaille bénédictine dans les mains recueillies) ; elle s'endormira suçant son pouce, paume ouverte, comme si elle trompettait par son silence l'essentiel, en confiance d'être entendue. C'est Marie et son histoire que dans "l'histoire sainte", elle continue de dire préférer, et dont elle aime la lecture, les images. C'est une femme, elle est belle. C'est la mère de Jésus, elle n'assimile pas encore ce qu'une vie entière n'atteint d'ailleurs pas, que ce peut être notre mère, que ce l'est.
L’élévation – comme cette première fois qui m’a fait aller à lui… les deux dames en onté été frappées : le respect, il porte vraiment quelque chose, ils ne sont pas tous comme çà, c’est rare. Et la redescente, une descente de croix ? Nous parlons beaucoup de signes, de gestes forts – en religion, en politique … en posons-nous ?


Je n’ai pas pris les nouvelles, ni lu « les journaux », mais il m’apparaît que, pour la France, la crise « mondiale » quelle que soit sa qualification : économique, financière… ne va être « gérée » par les dirigeants au pouvoir ou candidats au pouvoir qu’en termes électoraux, c’est-à-dire sans recul, sans technicité, sans liberté d’esprit, sans concertation réelle avec les opérateurs ou les victimes, la politique en solo. Le Parti socialiste pâtit de sa démocratie interne, puisque son programme adopté avant l’investiture de son candidat est ignoré par les électeurs comme par les candidats à l’investiture… et surtout, il est – en tant que tel – sans voix pour répliquer au prince régnant ou pour énoncer clairement son analyse et ses solutions : il est absent politiquement et doctrinalement. Pour la majorité présidentielle, elle pâtit de cette « réforme » dangereuse qui a consisté à limiter à deux les mandats – je n’ai pas vérifié s’il s’agit de mandats consécutifs ou pas, en sorte que la manœuvre Poutine pourrait se pratiquer en France – puisque le débat interne qui, plus encore qu’à gauche, est un débat de personnes, oppose ceux qui auront le bon âge seulement en 2017 et ceux qui ne l’auront plus mais l’ont actuellement pour rivaliser avec Sarkozy. Les uns ont intérêt à ce qu’il perde, d’autres à ce qu’il gagne. La certitude est que la course, s’il est réélu, commencera dès sa réélection.

Pour le monde, il est clair que la « crise » n’est qu’ « occidentale », et pratiquement euro-américaine. Les « brics », j’ai appris le sigle (Brésil, Russie, Inde, Chine)…, comme il y avait les PECO… sont spectateurs mais pas encore arbitres : leur degré de créance sur le système qui foire est disparate et ils ont tous intérêt à ce que ne fléchissent pas chez nous la consommation, et que ne chutent pas trop nos deux monnaies, euro. et dollar. Dans le couple euro-américain, chacun joue solo, d’autant plus qu’à l’intérieur de l’Union chacun joue aussi son va-tout (la plupart des « grands » pays sont en campagne électorale et le seul qui ne l’était pas constitutionnellement, Cameron, le devient puisque les émeutes et l’affaire Murdoch le « fragilisent » comme on dit, de même qu’on dit « déstabiliser »…). Le couple franco-allemand n’est pas inventif, il est sans affinité au « sommet », il est manifestement obligé, il n’a pas encore été mis à l’épreuve : Merkel a son opposition interne à la CDU et avec la Bundesbank, Sarkozy a sa réélection en jeu. L’épreuve serait la dégradation du fameux AAA – notion dont personne ne parlait il y a six mois (tout au plus, y faisait-on allusion pendant le débat sur les retraites) – pour la France.

Enfin, il y a la dégonflade du « printemps arabe ». En Tunisie et en Egypte, le peuple ou la foule ou l’élite citoyenne a seulement permis des révolutions de palais, l’armée reste au pouvoir, elle ne fera pas la démocratie, elle est anonyme, elle poussera un médiocre comme le furent chacun dans leur pays Ben Ali et Moubarak, bien loin de l’envergure des Bourguiba et des Nasser et certainement pas inventif comme le fut Sadate. Autrement dit, le changement – une fois encore – ne viendra pas du sud. Il ne l’est venu que dans les années 50 et 60 : la décolonisation, laquelle devait beaucoup à la « guerre froide » et surtout au triomphe du communisme – peu importe s’il était imposé ou consenti – sans lequel la guerre d’Indochine eût été impraticable pour le Vietminh, guerre d’Indochine qui amena nos couleurs aussi au Maghreb. Ce qui veut dire que la contagion en Europe – les « indignés » se réclamant ou pas de la brochure de Stéphane Hessel – ne sera pas à l’image du sud, mais si elle se fait, sera sui generis. Pour le moment, chacque situation nationale semble autonome et d’expression différente. Mais le suspens est général. On ne peut pas demander plus aux salariés, aux consommateurs qu’on ne le fait. Il est devenu évident qu’il y a eu depuis vingt ans des erreurs stratégiques sur le plan de la structuration des relations économiques et commerciales mondiales, et qu’il n’y a pas eu depuis les avertissements de l’automne de 2008 de débuts de médication, au contraire on a encore augmenté les dettes dites souveraines pour soutenir les systèmes bancaires. Au lieu de soutenir les entreprises donc les activités, l’emploi, la croissance.. Les dirigeants ont fait de l’économie politique, repeignant et consolidant les façades, quand il aurait fallu faire de la politique économique, et plus encore de la concertation sociale.

Je suis tombé – en rangeant des livres et en cherchant d’autres – sur un rapport intitulé : « retraites et épargne ». C’était au début du quinquennat de Jospin, l’intéressant me paraît dans les extraits du discours qui sont donnés, pour l’installation de ce conseil d’analyse économique à Matignon, sans que soit d’ailleurs mentionné la révolution qui s’opère : la suppression du commissariat au plan, prévisionniste et débatteur, concertant, synthétisant. La gauche de cette époque, il y aura bientôt quinze ans, a préféré le conseil intime du chef à une structure de rencontres entre tous les intervenants dans le domaine économique… elle a préféré l’évaluation dossier par dossier à une mise en commun avec calendrier des efforts de chacun.

[1] - Apocalypse de saint Jean XI 19 à XII 1 à 10 passim ; psaume LV ; 1ère lettre de Paul aux Corinthiens ; évangile selon saint Luc I 39 à 56


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