mercredi 6 février 2013

Tchad - témoignage vécu ... suite


----- Original Message -----
From: F.
Sent: Wednesday, February 06, 2013 7:45 PM
Subject: Re:

Je m'excuse de ce silence qui est indépendant de ma volonté. Pour répondre à votre mail, je vous dis que je ne me sens pas du tout bien. Avec ma démission, la commission est prise en otage par les députés MPS. Ils feront passer aisément le rapport sur la révision de la Constitution à la plénière du 12 Février 2013. Ils ont une majorité mécaniquement écrasante. Le sort des millions de Tchadiens est ainsi décidé par un petit groupe de députés.

Mon pays est devenu une terre d'insécurités, d'assassinats, de rapts d'opposants politiques et des défenseurs des Droits de l'Homme, de journalistes, des citoyens soupçonnés de complots ou accusés d'être les sympathisants d'un adversaire politique, une terre d'injustice, de violence, de misères. Des viols, des intimidations, des raquettes de masse dans les régions acquises à l'opposition pour punir, humilier ceux qui ont osé braver son autorité. Des incendies et des destructions des villages, emprisonnements des puits au Nord, des sacages des récoltes, des dévastations par des boeufs des éleveurs. Des enrôlements de force des enfants pour faire paître les boeufs (dit enfants bouviers). Des exécutions extrajudiciaires, des arrestations arbitraires. Toute velléité de contestation démocratique est reprimée aveuglement dans le sang par son escadron impitoyable de la mort. Personne n'a de dignité. La justice, garante des droits et libertés fondamentales et individuelles, est muselée, bâillonnée, soumise, paralysée, étouffée. Depuis deux ans, aucun jugement rendu par le Tribunal de commerce ; sauf les référés. Il n'y a ucune garantie aux investisseurs. Depuis plus d'une année, le Tribunal du Travail n'a pas siégé. Le syndicat des magistrats est affaibli par les affectations de ses membres en violation du Code de travail. Les juges sont radiés pour avoir pris le courage de dire la vérité, pour avoir pris service avec retard ; et cela après une quarantaine d'années de services loyaux rendus au Tchad et aux Tchadiens. Le ministre a délocalisé la justice et a ainsi bloqué la tenue des audiences pendant sept mois. Le parquet est detaché, loin du Tribunal. Pendant plus d'une année, les juridictions fonctinnent sans leurs chefs. La cour d'appel est gérée sans le Procureur général depuis seize mois. Dans ces conditons, nous chassons les investisseurs du Tchad et l'économie sera mise à genoux.

Deby et son clan se livrent, depuis 23 ans, au pillage des ressources du pays. Après 23 ans de règne sans partage, le Président Général Sultan a plongé et plonge encore le Tchad dans une extrême pauvreté malgré les revenus énormes du pétrole, du ciment. Les tchadiens n'ont, dans leur écrasante majorité, accès ni à l'électricité, ni à l'eau potable encore moins aux soins de santé adéquats. Des écoles primaires construites par des pailles qui fonctionnent avec un seul enseignant intervenant du CP1 au CM2. Des centres de santé qui sont gérés par un seul sécouriste ou un seul infirmier sans médicaments ou des médicaments périmés. Des hôpitaux sans sages-femmes, sans morgue, sans blog opératoire, sans appareils radiographiques et sans ambulance existent au Tchad, exportateur de pétrole. Un seul professeur de maths ou physique pour la plupart des lycées et collèges.Tandis que manger devient un véritable parcours de combattant pour chaque famille tchadienne, Deby et son clan festoient sans cesse, s'offrent des palais luxueux, des appartements un peu partout dans le monde, voyagent et dépensent des millions d'Euro dans les grands hotels dans les grandes capitales occidentales. Des voitures de luxe sont bourrées des millions et des armes de poing et des kalachnikov. Toutes les entreprises et sociétés de l'Etat sont gérées comme leurs propres biens. Ses collaborateurs le décrivent comme brutal, impulsif, paranoïaque. Ils font fréquemment les frais de sa rudesse et de son plaisir à humilier, rabaisser, dominer de façon manifeste à l'égard des cadres et intellectuels. Il y a ceux qui sont marqués à vie d'horribles sévices ou disparus à jamais. Quelques-uns ont témoigné avoir reçu des gifles, insultes ou coups de pied en plein conseil des ministres.

Je vous reviens après la rencontre avec un ministre avec qui j'ai pris un rendez-vous !

Merci et à bientôt !


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