jeudi 20 mars 2014

archives pour la mémoire vécue de notre histoire immédiate - 13 Novembre 2007


Observation & réflexions

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Mardi 13 Novembre 2007

Ce soir, à vingt heures, début de la grève reconductible des transports publics. Le secrétaure général CGT des cheminots met en garde la coordination étudiante contre des blocages de gares : risques de dérapage. L’UNEF, sans que Bruno JULLIARD soit en avant, comme pour le CPE, est sur cette ligne là aussi. Les Jeunesses communistes de même, laisser les travailleurs fixer leur tactique. De Berlin, Nicolas Sarkozy répète que les réformes sont nécessaires et seront donc faites. Sondage pour Libération : le président perd sept points mais reste populaire à 54%, le Premier ministre perd quatre points. Un autre sondage montre que les Français jugent la politique économique inefficace. Voilà l’entrée en lice.
Ségolène Royal maintient le style d’une part de sa campagne : titre de son livreèbilan de celle-ci, Ma plus belle histoire, c’est vous.
Au loin, la Birmanie est imitée par le Pakistan, une femme populaire et courageuse défie des militaires mettant le pays dans l’impasse pour des générations ?

Erreurs propres au gouvernement
et voulues par Nicolas Sarkozy,
vulnérabilités françaises

Tous les éléments sont réunis pour un face-à-face entre le président de la République et les Français (note n° 11 des 5-6 Novembre derniers), mais l’affrontement est voulu – comme un pari – par le pouvoir que ces derniers ont élu le 6 Mai 2007 et qui reste populaire. Sciemment, nous allons vers l’inconnu.

Le président, le Premier ministre et le secrétaire général de l’U.M.P. rivalisent d’ « affichage », la fermeté. Le ministre du Travail n’a pas accepté les demanbdes de la CGT d’une réunion tripartite sur les régimes spéciaux de retraite. La cause du conflit peut paraître minuscule. Pas 500.000 salariés concernés et tant d’aménagements consentis la semaine dernière que le gain de la réforme paraît lui aussi minime. Tout se passe comme si – ayant épuisé les annonces en politique intérieure : ouverture de la composition gouvernementale, ouverture des chantiers de réforme, et en politique extérieure : coups en Libye et au tchad, « mini-traité » européen, ayant accompli ce qui pouvait l’être sans délai ni attente d’une réponse par les évé,ements ou par les agents économiques : votes de loi en matière de fiscalité, d’immigration, d’organisation universitaire – le gouvernement, le président personnellement n’admettant que des échos et des relais, souhaitait que soit administrée la preuve que la majorité des Français suit plus que jamais. Ayant mis la consultation référendaire hors la panoplie institutionnelles, assurant que les élections municipales  ne seront pas un enjeu national quoique la plupart des ministres soient candidats, qu’ils soient de carrière élective jusqu’à présent ou pas, le pouvoir souhaite être confirmé sur le terrain choisi par le candidat de ces dernières années : la rupture. Mettre au tapis l’adversaire… arbitrage et instrument à la fois, l’opinion publique. Pari : le motif des grévistes étant corporatiste, le projet de l’exécutif étant de rétablir l’équité, les Français départageront.

Deux risques.

Le premier est qu’une jonction s’est opérée entre divers mécontentements. Les étudiants, quoique la « loi Pécresse » soit de lecture multivalente, épousent le calendrier des protestataires du secteur public. Les magistrats et les avocats peuvent aisément faire confondre par les justiciables leur enjeu de gagne-pain et de commodité personnel avec la pétition populaire d’une justice de proximité. Les cheminots n’ont pas persévéré – malheureusement – dans l’idée d’une grève de la gratuité qui eût été immensément populaire (et que la Cour européenne des droits de l’homme a avalisé dans l’espèce turque), mais ils font prendre conscience du décalage entre le fixisme verbal du pouvoir et des concessions déjà obtenues par entreprise ; la nécessité des changements n’est plus contestée, mais la méthode gouvernementale, dont ils ne sont que le banc d’essai, puisqu’il est acquis que des quarante années de cotisation, on projette d’aller à quarante-et-un, voire quarante-deux ans… La reconductibilité de la grève est propice à tous les heurts. La cause n’est plus aussi focalisée et circonscrite que l’impose – tactiquement – le pari gouvernemental. Le pouvoir ne peut l’emporter que si la confrontation n’est que sectorielle. L’inconnu était initialement la durée, il est devenu l’extension.

Le second risque est que la réforme en question ne soit pas efficace. L’évidence est que les précédentes, celeles opérées sous Jean-Pierre Raffarin ont été des demi-mesures. La mûe des finances sociales, pas plus que celles des finances publiques, n’est encore opérée en France.

Le pouvoir a plus à perdre que les grévistes. Il joue la crédibilité du mandat présidentiel, à peine commencé. Crédibilité dans l’efficacité et la méthode. Crédibilité dans le soutien populaire.

Conduire la vie politique du pays en jouant sur les instincts : attirer les candidats aux responsabilités gouvernementales (sans leur en donner les moyens, quel ministre de Bernard Kouchner à Fadela a la possibilité de son travail ? Michèle Alliot-Marie ridiculisée par les objurgations qu’elle reçoit à propos des incidents canins), en assénant des réformes d’entrée de jeu et sans concertation que puissent reconnaître les ensembles concernés (carte judiciaire, université), en choisissant le pari pour réduire la résistance sociale… les Français le savaient, vont-ils persévérer à le vouloir ? S’ils changent d’avis et censurent dans la rue et par une popularité qu’ils accorderaient au mouvement social et non plus au seul président, contraignant l’un et l’autre à se rencontrer et négocier vraiment – ce que je crois le probable dénouement – ils imposeront au quinquennat de Nicolas Sarkozy un cours peu prévu, mais salutaire.

Car les indices d’adéquation du système pratiqué depuis le 16-Mai (entreée en fonctions présidentielles de Nicolas Sarkozy) ne sont pas probants.

La conjoncture économique ne peut se retourner ni pour la France ni pour l’Europe dans les mois qui viennent. Tout indique au contraire que nous sommes entrés dans une crise économique mondiale durable, d’une ampleur et de rebondissements qui pourraient n’avoir d’analogie que la crise de 1929. L’euro. et le pétrole a des cours de dérèglement général, sans qu’aucune institution y puisse grand-chose, sauf à supposer que les Etats-Unis acceptent de revaloriser leur monnaie et donc de se faire souffrir. La crise chez eux de la subprime est déjà assez ravageuse. Si c’est la Chine – comme certaines déclarations le font déjà attendre – qui lâche le système empirique qui fonctionne encore, et cesse donc d’absorber la monnaie de singe qu’est le financement des déficits américains, les équilibres mondiaux seront rompus brutalement et non par une remise en ordre et un nouveau partage des responsabilités économiques, monétaires et commerciales dans le monde. L’Europe en tant que telle ne manifeste ni souhait ni lucidité. Comme ses bourses de valeur, elle suit…

Les relations internationales sont périlleuses. La présence diplomatique française nouvelle est décalée par rapport à ces mutations et également à des enchainements ponctuels. Nicolas Sarkozy raisonne sur les institutions, en fonction de leur dérèglement sous Jacques Chirac refusant la sanction des urnes en 1997 et en 2005 ; il raisonne sur une base aussi fausse en acceptant la rédaction de ses discours de Dakar et de Tanger pour les relations franco- ou euro-africains ou pour une Union de la Méditerranée. Qu’il indispose est secondaire. Il manifeste surtout qu’il est sans vision du monde en train de se faire. Coller aux Etats-Unis à propos de l’Iran et amener l’Allemagne à vouloir, elle aussi des sanctions économiques plus rudes, peut paraître positif : les velléités de guerre d’agression à l’irakienne s’éloignent, mais pas de son fait. Moscou reparu en force depuis que la Russie a été défiée frontalement par les Etats-Unis dans l’affaire du « bouclier anti-missile) reprend l’histoiere est-ouest où elle en était restée, c’est-à-dire à la première guerre du Golfe, celle de 1990, coiincidant avec l’implosion soviétique et donc l’impuissance au Kremlin.

L’Allemagne et la France ont eu, ces derniers temps, exactement les mêmes itinéraires diplomatiques : Moscou, Washington, Angela Merkel, dans un appareil plus simple, y est allée à la suite de Nicolas Sarkozy. Les conversations du président de la République sont multiples dans l’agenda, sont-elles de fond ?

La méthode ? Aller à Guilvinec, faire avouer en aparte au Premier ministre qu’il n’est pas souhaité « sur le terrain » par l’Elysée jouant l’exclusivité et improviser des solutions, des promesses sans avoir prévu Bruxelles : scenario des zones franches en Corse qu’avait vêcu Alain Juppé, pareillement désavoué selon des mécanismes que nous devons connaître et pratiquer, d’autant que nous y participons depuis 1951… les traités ne sont pas des drapeaux, même si la sensation d’une prise de parole un 11-Novembre – ce qu’aucun prédécesseur sous aucune République – n’avait jugé séant de faire, permet une rapide assimilation entre beaucoup de sujets, beaucoup d’histoire et des engagements d’Etat. – Quant à des propos à l’emporte-pièce (codicille édifiant au discours de Dakar) comme ceux tenus par le président de la République dans l’affaire de Zoé au Tchad, ils ne facilitent rien. – La visite d’un Khadafi que la menace d’un sort analogue à celui de Sadam Hussein, a assagi du fait américain, pas du nôtre, elle est paradoxale et n’aurait de sens que si elle contribuait à une meilleure conjonction opérationnelle entre l’Union européenne et l’Union africaine.  est-ce la conjecture de Nicolas Sarkozy ? Comment le gouvernement et les diplomates peuvent-ils travailler sur une mappemonde et sur une société nationale en mutation tandis que le président de la République est lui-même un des facteurs de l’imprévisibilité ? Même les traditions, comme celle de la relation franco-allemande, deviennent douteuses pour des raisons de tempéraments personnels. Chaque rencontre avec Angela Merkel doit être réécrite, ensuite.
Le mouvement social de cet automne – fruit d’une génération nouvelle tant du côté du pouvoir que de celui des syndicats, et surtout des étudiants – détermine une prise de conscience : nous devons apprendre, d’urgence, à débattre. Ce qui n’est ni perte de temps ni dispersion. Testament que je recueillais par la rencontre improviste de Paul Ricoeur à quelques semaines de sa mort tandis que Jean-Pierre Raffarin entrait à Matignon.

Justement la politique traditionnelle est en retrait, ce qui n’est pas forcément une lacune. Depuis l’élection présidentielle, mezzo voce, l’ancien Premier ministre et futur président du Sénat est probablement le seul dans la majorité à faire les signaux utiles : les tests ADN discutrabes selon lui, le Premier ministre dans son tort en n’honorant pas avant-hier par sa présence le conseil national de l’U.M.P. Le parti socialiste peut faire ricaner. Il fait sa purge des rivalités de personne, ne sort pas de sa tradition d’observer le mouvement social plutôt que de l’épouser ou de prétendre le conduire, il respecte l’horreur du monde du ttravail que soient mélangés les genres. Ségolène Royal continuera de voyager, progressivement elle s s’assimile à Bachellet, Krichner et pourquoi pas à la prix Nobel birmane ou à la pasionaria pakistanaise. « People » ? Nicolas Sarkozy, en couple, en vacances, au Fouquet’s n’avait pas dédaigné cette pose pas plus que les suffrages décisifs des électeurs « frontistes ». Il se peut que l’opposante devienne « historique » par cela : elle a été la seule à dénoncer fortement les franchises médicales et à stigmatiser la non-intervention du pouvoir dans les changements de main qui révolutionnent la propriété de la presse écrite, et singulièrement économique.

Vulnérabilités françaises.

Notre manière de confronter les points de vue. La centralisation de l’imagerie politique. La source de l’information (si l’A.F.P. devenait partiale, servante ?). La mise en bourse de nos entreprises et notre incapacité à édifier des fonds de pension, des fonds de réserve à notre taille pour un autre financement de nos actifs que par l’étranger. Le système de cooptation dans la direction des très grandes entreprises. Les financements occultes. Le dédain pour les appels aux valeurs : les positions de l’Eglise catholique en France sur l’immigration ne sont pas prises en compte ni par le pouvoir ni par la majorité parlementaire.

Le poids dans les postures gouvernementales de ce que l’on croit être l’opinion publique – alors que celle est mal connue. Tchad, mouvement social. Des retournements en quelques heures, de la condamnation à des gestes contraires.

La méconnaissance de nous-mêmes. L’INSEE et sa nouvelle évaluation du chômage. L’enquête sur les violences à personne./.



disponibles par courriel sur demande :


15 notes sur la campagne et l’élection présidentielles,
rédigées du 12 Novembre 2006 au 8 Mai 2007


journal réfléchi

14 . 20 Mai 2007
Le point de départ
Les commencements
Les contradictions inévitables
Les lacunes institutionnelles

25 Mai 2007
Quelques « grilles de lecture »
Le pouvoir personnel ou « l’homme d’une nation » ?
La sécurité (du pouvoir)
Le concret, le terrain, les urgences : qu’est-ce à dire et à faire ?

31 Mai . 5 Juin 2007
Nouvelle génération et antécédents consensuels
Une périlleuse prétention
La probation diplomatique
La quadrature du cercle ?
15 . 16 Juin 2007
La manière du candidat ne peut être celle du président de la République
La démocratie de gouvernement
Les débuts de « l’action »

17 . 24 Juin 2007
Déblais…      
Une claire distribution des rôles et des stratégies, au pouvoir et dans l’opposition
La fausse obligation de hâte
Le mode de scrutin pour désigner les députés  l’Assemblée Nationale est-il adapté ?

6 . 10 Juillet & 12 Septembre 2007
Notre pays, notre temps, notre monde – banalités ?
Notre pays, notre temps, notre monde – ce qui change
Les paradoxes qui demeurent
Les précédents ne valent que pris dans la période Cinquième République         
Concept et pratique de la carrière politique - Logique républicaine et accélération des dévoiements
Difficulté de l’émergence d’une nouvelle éthique des grands patrons français

19 Septembre 2007
Des bons points        
Des mauvais points
Des indices
Des sujets d’inquiétude

4 Octobre 2007
I – Politique intérieure
tout se répète
la nouveauté : l’organisation du pouvoir
l’ouverture
le risque de saturation
la pierre de touche
la lacune
l’isolement
II – Politique extérieure
le changement vis-à-vis des Etats-Unis
l’abandon de la priorité européenne

15.19 Octobre 2007
Les pièces du puzzle ? ou « les silences du scenario »
. consacrer quelques premiers mois d’un exercice du pouvoir par une modification de la Constitution ?
. un fonctionnement à risques quotidiens de l’ensemble du mécanisme élu ce printemps
. elle aussi sans précédent, la mise en scène en responsabilité partagée d’une vie de couple
. vis-à-vis de nos partenaires en Europe et de l’entreprise d’Union, une attitude toute nouvelle et sans précédent depuis les fondations des Communautés européennes et de la Cinquième République
. c… par-dessus tête en économie et en social
. les contre-pouvoirs qui s’établiront sans octroi du pouvoir en place

23.25 Octobre 2007
. . . le temps où nous sommes, pourquoi ne savez-vous pas le juger ?
le régime se qualifie lui-même
l’Europe à défaire ?
le mouvement social et l’opposition parlementaire
l’économie seconde

5.6 Novembre 2007
La gestion des crises
La gestion du fond
Desseins et tempêtes
La contradiction



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