samedi 15 mars 2014

archives pour le vécu de notre histoire immédiate - 4 Octobre 2007



Observation & réflexions

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Jeudi 4 Octobre 2007

Je lis, recueil sous la direction de Jacques Attali, L’avenir du travail . Fayard . Juin 2007 . 155 pages – Je ne lis pas le « réquisitoire » de Lionel Jospin contre Ségolène Royal. J’ai lu tous les discours de substance de Nicolas Sarkozy depuis qu’il est arrivé à l’Elysée.
Réponses de deux cousins à ma question sur ce qu’ils pensent ou vivent des premiers mois du nouveau quiquennat. Que pense-t-elle ? elle me dit n’avor aucune compétence en politique ni sur ce qu’il faut faire, je rétorque que c’est affaire de pensée et de jugements personnels sans critère ni science exacte mais n’insiste pas, je l’écoûte. Elle dit précisément qu’avec Nicolas Sarkozy, c’est la première fois qu’elle s’intéresse à écouter un homme politique, il parle clair et net. Lui est d’un autre ton, il trouve le nouveau président m’as-tu-vu, lassant parce que trop personnel, mais il approuve que tous les dossiers soient ouverts, la concertation c’est bien mais il faut qu’elle ait une fin. Il estime que la nouvelle génération, ceux de trente ans, ne veut pas être dans le camp qui perd, qu’elle a conscience d’être dans un pays qui depuis vingt-cinq ans perd, qu’elle travaille plus pour payer les dettes des générations précédentes et de dépenses de confort et de complaisance, qu’elle aura des retraites moindres et plus tardivement prises. Il a été frappé par l’exemple d’un des grands-pères de sa femme : dans une compagnie d’assurance après avoir été militaire et fait Polytechnique, il rentrait à cinq heures du soir pour le thé que lui préparait sa femme, ils avaient huit enfants et vivaient bien. Aujourd’hui, l’immobilier hors de prix. Il faut absolument deux salaires et l’on s’endette, on aura à travailler plus longtemps dans sa vie et déjà chaque jour et chaque semaine.
Assez d’accord avec ces deux appréciations (puisque je pratique la première en découvrant le site internet de l’Elysée, qui existe pourtant depuis au moins 1995 et les débuts de Jacques Chirac – dont la plupart des textes, non en direct, restent, là, accessibles – et ressent, quoique d’une autre génération, la même angoisse que celle formulée par la seconde, ce qui me fait souhaiter qu’en tout état de cause, l’élu du 6-Mai n’échoue pas en gestion), je comptais titrer ainsi pouvoir, opposition, gouvernement, démocratie = économie ? mais

. . . depuis trois semaines un changement de vent [1]et aussi la précision des traits du nouveau cours. La coincidence n’est pas bonne, car les deux évolutions sont antagonistes. Elle se double d’une mise au net des relations internationales, égalment nouvelle à deux points de vue : la politique de la France, l’agencement des questions et des puissances.

Déjà enfermé ?

J’essaie de dire brièvement en quoi et comment. Le succès du quinquennat commencé le 16 Mai dépend de la capacité de celui qui a reçu le mandat présidentiel d’épouser les circonstances et de répondre non de la réalisation des souhaits pour lesquels il estime avoir été élu, mais des circonstances et du fond des problèmes qui se posent au pays à notre époque pendant ces cinq ans. Rien de plus et rien de moins. Libre à lui d’ambitionner de marquer davantage. L’exemple de ses cinq prédécesseurs est éclairant, de Gaulle et Mitterrand ont marqué (et duré) parce que parti d’un point, ils sont arrivés à un autre et ne sont pas restés sur la plate-forme de leur commencement (décolonisation et remise en ordre macro-économique pour le premier, rupture étatiste pour le second). De même, la souplesse de Georges Pompidou, parti d’une différenciation par rapport à de Gaulle sur presque tout et aboutissant (sur son lit de mort) à presque tout ce qu’avait fondé ou tenté le général. Au contraire, Valéry Giscard d’Estaing – pour une part – et Jacques Chirac – en totalité – n’ont pas évolué en cours de mandat. Ils étaient, il est vrai, moins bien élus que les trois précédents.

 L’erreur de fond – pour le nouveau président et pour ses partisans – serait d’analyser la victoire électorale comme une décision unanime et un acte de confiance exceptionnel. Même si le score est très net statistiquement, le résultat est précaire, les esprits étaient mouvants et le demeurent. La réalité est autre : elle est une grande lassitude vis-à-vis de gestions inopérantes depuis une vingtaine d’années – en cela, l’analyse de Nicolas Sarkozy, publique depuis 2002, est juste – mais elle est surtout doublée d’une aussi grande perplexité dans le choix des moyens pour en sortir. Les deux écoles – décider à tous crins, vite et sur tout ou bien faire participer et débattre tous pour tout – ne se sont opposées que dans les slogans. Ou plutôt, le caractère des principaux candidats était de même type : une solitude dans l’exercice du pouvoir du fait d’une constitution psycholgie intime n’inclinant pas à la consultation et au partage ni de la décision ni de la mise en scène, la croyance (mystique) en une mission personnellement reçue pour changer totalement la donne française, et par là – peut-être – mondiale. Ségolène Royal – injustement brocardée en ce sens – n’est pas différente de François Bayrou ni de Nicolas Sarzkoy. Chacun en campagne a eu ce comportement et chacun, exerçant le pouvoir aurait ou a à l’esprit la même conviction d’être personnellement décisifs. Ce qui dans l’histoire contemporaine n’a été vrai que pour de Gaulle – l’appel du 18-juin suffit à la démonstration – et pour Mitterrand sans la personne et la stratégie duquel la gauche n’aurait jamais remporté l’élection présidentielle – 2002 et 2007 tendent à le montrer mais l’histoire continue… Or, qui dit perplexité dit complexité de l’état d’esprit des citoyens, certainement pas le blanc-seing et certainement une liberté d’examen et de jugement vis-à-vis du nouveau pouvoir égalant celle dont fait preuve le nouveau Président de la République pour toutes les questions de politique intérieure et de politique extérieure.

Nicolas Sarkozy fait donc face à une situation compliquée, difficile, figée en apparence, autant qu’à des concitoyens complexes et complexés. Les cinq premiers mois de son exercice du pouvoir le montre structuré – d’esprit – sur ce qui lui a permis de s’imposer à droite et de l’emporter sur la gauche. Mais – en plus de ce facteur de rigidité – apparaît une méthode peu propre à susciter l’adhésion du grand nombre et des proches (ce dernier point est très grave) et encore moins adéquate pour traiter des sujets qui – « pourrissant » depuis des décennies – sont subtils.

Je remarque cela en politique intérieure et en politique extérieure. Et traite l’une et autre séparément. En effet, le nouveau président n’arrive pas à les lier, sauf électoralement et sa contradiction – s’il veut obtenir des « résultats » - est là. Pas de politique ni de décision économique, donc de budgets publics ou de financements sociaux, pas d’outil à la main de l’Etat même quand le mot d’ordre est la déréglementation, s’il n’y a pas osmose avec nos partenaires de l’Union européenne et politique propositive, anticipante à Bruxelles. Or, nous ne sommes que demandeurs vis-à-vis des autres Etats-membres. L’entente diplomatique ou mentale avec les Etats-Unis ne résistera pas à la tentation protectionniste de fond à laquelle on cède pour faire le moins d’Europe possible, alors que précisément c’est celle-ci qui a été le vecteur des propositions structurantes américaines depuis vingt ans. Le lien, c’est l’addition des voix de l’U.M.P. et du Front national qu’il est vital de maintenir.

La question – d’ordre psychologique ? – est de savoir comment Nicolas Sarkozy, entré en politique dans le « milieu » encore gaulliste des années 1970, a-t-il pu se donner des convictions pro-américaines, pro-patronales et répressives en matière d’immigration. Aucun de ses prédécesseurs ne les avaient et – surtout – s’ils les avaient eues, ne les auraient jamais affichées au point où elles le sont par le nouveau Président de la République. Convaincu que cet affichage fait sa force dans l’esprit des Français ? J’ai tendance à penser le contraire, que ce n’est que toléré dans l’attente des « résulats » dont il tente depuis 2002 d’inculquer partout la « culture » et que si ceux-ci ne sont pas probants rapidement, c’est cet « affichage » qui le perdra. Mais je peux me tromper, et l’échec de Nicolas Sarkozy – en économie et en société, dans le réel et non dans ce qui se voit – serait catastrophique pour le pays, pour nous, puisqu’il s’ajouterait à l’immobilisme d’une vingtaine d’années.



I – Politique intérieure

Elle est caractérisée par « l’omniprésence » du nouveau Président de la République. La statistique de ses apparitions télévisées ou la recension de ses discours et déclarations n’en est qu’un indice

       tout se répète

2002 … dès sa nomination comme Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, affirme vouloir agir « au galop » pour répondre à l’ordre de mission de Jacques Chirac, réélu Président de la République de « rompre avec l’inaction pendant cinq ans » (celle du gouvernement de la gauche, dirigé par Lionel Jospin)… Francis Mer, chargé de l’Economie et des Finances, comme aujourd’hui Christine Lagarde, hors du « sérail » politique,  prend l’engagement de réduire les dépenses publiques en sorte d’atteindre un niveau proche de l’équilibre des finances publiques en 2004 … un audit, commandé aux deux magistrats de la Cour des comptes, Jacques Bonnet et Philippe Nasse qui avaient exécuté le même travail à la demande de Lionel Jospin, cinq ans auparavant, réévalue le déficit prévu pour 2002, entre 2,3 et 2,6% du produit intérieur brut. Le Premier ministre (Jean-Pierre raffarin en 2002) juge « catastrophique » la situation financière du pays.
2007 … François Fillon se pose en « chef d’un Etat en faillite ». Il s’engage à ramener le déficit budgétaire au niveau des engagements pris à Bruxelles et à équilibrer le régime des retraites … pour 2012, année de réélection du Président de la République qui n’a pu obtenir, quoiqu’y ayant participé personnellement, de l’ « Ecofin » – réunion des ministres de l’Economie et des Finances des Etats-membres de l’Union européenne – que la France soit dégagée de la date de 2010.
C’est devant les 2000 commissaires de police de France, réunis dans la grande salle du Carrousel du Louvre, qu’aux côtés du Premier ministre, Nicolas Sarkozy, de retour au gouvernement comme ministre de l’Intérieur, demande que s’instaure et se pratique une « culture du résultat »  (26 Juin 2002).
La thématique du nouveau pouvoir est exactement celle du dernier Premier ministre de Jacques Chirac : le volontarisme, le patriotisme économique, mais en plus crédible puisque la durée a vite échappé à Dominique de Villepin, quoique les mêmes « affaires » peuvent empoisonner le nouveau mandat comme elles ruinèrent le dernier gouvernement. Si un lien s’établissait, comme l’insinue Dominique de Villepin entre « Clearstream » et l’ensemble des erreurs et des délits commis dans la gestion d’E.A.D.S., la relation entre le Président de la République et l’un des principaux patrons de l’industrie et de la presse françaises ne serait plus un avantage, un critère de la réussite personnelle de l’élu  du 6-Mai, une exemplarité.

        la nouveauté : l’organisation du pouvoir

Trois traits.
La relation entre le Président de la République et le Premier ministre n’est pas qu’à la minoration du second. Les « lettres de mission » aux ministres ou à des tiers sont signées des deux personnages. Mais elle est plus explicitement conflictuelle que dans les cas d’opposition de personnes – Michel Rocard vis-à-vis de François Mitterrand – et ce caractère, ne facilitant ni le discours officiel (l’attention des médias appelé davantage sur toutes nuances entre Nicolas Sarkozy et François Fillon, que sur le fond) ni le travail de conception, ne s’explique pas par des divergences de vues sur les grandes questions, comme il a été naturel en période de cohabitation, et donc de rivalité politique et électorale. Voulant répondre de tout, Nicolas Sarkozy aurait pu choisir une toute autre méthode que la mise en scène de sa primauté. Il aurait pu dans les tête-à-tête avec le Premier ministre, avec les principaux ministres, avec tous ceux qu’il a chargé de réflexion ou d’investigation, affirmer la priorité de ses engagements et la supériorité de son point de vue, mais après écoûte et en débattant, sans que cela se sache. Le résultat aurait répondu à la revendication en paternité. La méthode choisie et dans laquelle il semble que l’on persévère, humilie le Premier ministre, également la ministre de l’Economie et de l’Emploi, pourtant rivale potentielle du Premier ministre par l’importance de son domaine ministériel, la qualité des services dont elle a la tutelle et par une personnalité apparue exceptionnelle. Cette humiliation – quoiqu’il y ait des réconciliations avec des génuflexions en marque de reconnaissance – est dangereuse, elle rend les comportements imprévisibles et les remplacements difficiles, car ils ne se feront pas – en cas de démission – à l’identique. Qui est candidat à l’humiliation ? E bien entendu cela monte les entourages et les clientèles les uns contre les autres.
La mise en évidence de personnages, dont les fonctions sont d’usage depuis des décennies mais moyennant un exercice discret. Claude Guéant, Henri Guaino et David Martinon se font voir, entendre et surtout signent – pour le public – ce qu’ils font pour le président : organisation, surveillance et au besoin doublage du Premier ministre et des principaux domaines gouvernementaux, plume et philosophie politique, communication… De conseillers auliques, ils deviennent des intermédiaires, donc à terme des écrans ou des repoussoirs. Régal pour les médias ; perplexité dans l’administration et à l’étranger ; flou pour les citoyens et les usagers. – Avec sagesse, il a cependant été mis une sourdine au flot des commentaires et à la mise en scène de l’épouse du chef de l’Etat.
La prise en main directe des élus de la majorité parlementaire par des harangues à l’Elysée-même est insolite. La chose était déléguée au Premier ministre par de Gaulle, Valéry Giscard d’Estaing, Jacques Chirac, elle se négociait et s’ajustait en réunion des « éléphants » (l’expression vint de là) à date fixe chez François Mitterrand, en continuité avec sa manière de diriger le Parti socialiste. Elle semble s’accentuer par une intervention dans les investitures, le cas de Neuilly est voyant, il va faire école autant parmi ceux – dans leur jeune âge – que le parcours et la manière de Nicolas Sarzkoy fascinent et inclinent à l’imitation, que dans les appareils locaux de l’U.M.P. hostiles à cette mésestime de la « base ». Celui de Mulhouse où l’opposante U.M.P. est empêchée par le Président de la République venu tout exprès, de se présenter contre lemaire sortant, socialiste rallié.
        l’ouverture

Hautement revendiquée, elle est une nouveauté car la campagne du candidat en avait fait bien moins état que François Bayrou, et précisément entre les deux tours, tout dialogue avec ce dernier avait été refusé. Il n’est pas sûr que cette tactique précarise la gauche et fortifie le pouvoir qui se met en place. Ségolène Royal voit ses compétiteurs s’éloigner du Parti socialiste, donc de la course, sauf Laurent Fabius. La direction générale du Fonds monétaire international – dont il est difficile de l’émanciper de l’influence américaine – peut décerner un brevet de notoriété internationale, certainement pas un label social. Lionel Jospin refuse toujours de présenter une analyse de son action comme Premier ministre et d’expliquer comment celle-ci a pu aboutir à lui faire manquer l’élection présidentielle dont il était favori, il est mal placé pour donner des leçons électorales. Les participations de quelques-uns, déjà à la marge du Parti socialiste, à la geste nouvelle décapent au contraire les états-majors et ressoudent les militants avec les chefs qui restent. François Hollande en est à sa troisième gestion du découragement : 2002, 2005, maintenant. Il sait tenir et faire aboutir un congrès, cf. Le Mans. Michel Sapin, que la rumeur place en succession, a la solidité et l’authenticité de Pierre Bérégovoy dont il fut partenaire. Pierre Mauroy, à son habitude et à celle des gens du Nord, auxquels Charles de Gaulle était éminemment sensible (il en était, cela se respire à Lille), tient la boussole. L’avenir de la gauche n’est dans l’imagination des socialistes, en tactique et en programme, elle est – face à la politique du nouveau pouvoir – dans la poussée populaire et la réflexion de certains critiques d’hier et d’aujourd’hui envers ceux/celles qui viennent d’échouer. Ce sera mathématique et irrépressible comme la victoire de François Mitterrand « à la longue » – quelle qu’aient été de 1976 à 1980 les qualités de Valéry Giscard d’estainh et de Raymond Barre, la solidité finalement et rétrospectivement de leur bilan.

Faire référence à de Gaulle pour cette ouverture en évoquant Vincent Auriol et Guy Mollet est mensonger, et décalé. En 1958, les circonstances du retour de l’homme du 18-Juin imposent qu’il soit pris acte des dispositions personnelles de ces deux éminences et d’une partie de la S.F.I.O. Cela ne donne qu’une place de droit, pour le premier, au Conseil constitutionnel et finalement aucun portefeuille que dans le gouvernement de transition pour le second (chargé notamment de régler, par intérim du ministre des Affaires étrangères, Maurice Couve de Murville, le contentieux de Suez avec l’Egypte de Nasser…). Dans notre dernière conversation, Pierre Messmer – à qui je demandais avant de prendre congé (il partait à la messe du soir) quels hommes exceptionnels l’avaient marqué – me promit d’évoquer à notre revoir… André Boulloche et Alain Savary… ceux-là avaient toujours été proches. Le ralliement au non en 1969, de René Pleven peina de Gaulle, celui de Valéry Giscard d’Estaing ne lui inspira que mépris.

L’ouverture avait été une stratégie de Georges Pompidou en campagne présidentielle, mais sur une base avérée publiquement : son dialogue sur Europe 1 avec Jacques Duhamel. Elle avait été sa tentative quand il avait été nommé Premier ministre en 1962 ; la rupture à propos du « Volapück » avait été nette et n’avait diminué personne. Y aura-t-il dans l’équipe constituée cet été des démissions à la Pierre Mendès France en 1956 ? Rama Yade, non sans éclat, le laisse attendre.

L’ouverture n’est pas une tactique de ceux qui en profitent et ne peut être une stratégie électorale pour ceux qui, en possession juridique et pratique des places, en offrent, à titre manifestement révocable [2].

Elle ne produit pas automatiquement ses fruits. Le rapport d’Hubert Védrine n’approuve pas l’atlantisme du nouveau président, la nomination de Martin Hirsch ne dissuade pas l’association Droit au logement de lancer des opérations voyantes ni Cimade de dénoncer la honte des camps de rétention (nous avons vêcu déjà cette clandestinité de la répression, la plus contraire à ce que nous voulons être et paraître, avec les « internements administratifs » de la guerre d’Algérie, en métropole-même). Michel Rocard avait déjà proposé idées et concours à Jacques Chirac pendant la crise de Novembre-Décembre 1995 et son soutien manque dans le débat sur l’immigration, au Sénat. C’est pour cause de mal-Europe qu’il refuse d’animer la commission de réflexion sur l’Union méditerranéenne.

       le risque de saturation

Nicolas Sarkozy ouvre personnellement tous les dossiers. Selon trois méthodes, mais qui se ressemblent en ce que chacune est une dictée tellement détaillée par le Président de la République que le canevas de la réflexion préexiste à celle-ci et qu’il n’y a plus que des exécutants. Les commissions – pour des sujets immenses, la révision constitutionnelle, la politique de croissance ou restreints, les minima sociaux – se voient fixer dans le détail leur ordre du jour, malgré la pétition de leur liberté. Les lettres de mission écrites publiquement à des ministres détaillent un travail qui n’est pas une action ou une responsabilité engageant solidairement le gouvernement devant l’Assemblée nationale et devant l’opinion, elles placent leurs destinataires sous contrôle. Les grands débats – auxquels Alain Juppé avait montré de l’attachement sans parvenir à les organiser pacifiquement : le financement de la sécurité sociale, la place du service public – sont tous référencés à un immobilisme et à des tabous dont nous devons sortir.

La liberté d’examen que manifeste ainsi le nouveau président est salubre, nécessaire mais est-elle entraînante ? Les copies sont trop pré-écrites à l’avance. Comment d’ailleurs les « ordres de mission » ont-ils été rédigés, pour être aussi détaillés ? et par qui ? en concertation réelle entre l’Elysée et Matignon ? ou avec les destinataires selon la discrétion d’une conversation tranquille et « démocratique ». La tenue de celle qu’avaient de Gaulle et Couve de Murville son ministre, chaque vendredi en fin de matinée, pendant onze ans. Sur son agenda, MCM notait – significativement - : rendez-vous. Sans ordre du jour ni communiqué ni prise de notes ni rédaction d’un quelconque compte-rendu, les deux hommes « discutaient » d’égal à égal. Le fond commun et l’estime mutuelle créaient l’opérationnel, à l’issue de ces quatre-vingt dix minutes… sans appels téléphoniques ni tiers.

J’ai l’impression que se gaspillent un réel courage intellectuel, une manière nouvelle parce qu’assez autodidacte d’appréhender les sujets – c’est l’apport de Nicolas Sarkozy à sa fonction – et les concours dont disposent les nouveaux arrivants s’ils font appel à « tout le monde ». Gaspillage par manque de culture, de vue d’ensemble, par défaut de discrétion, par le paradoxal souci de l’électorat alors qu’on s’est organisé pour ne pas le retrouver avant cinq ans.

Il se peut cependant que ces multiples exercices de commande offrent quelques surprises à la livraison, que les personnalités mises en loge – quand on les suppose d’élites (visions très mélangées et allusives jusqu’à présent de Nicolas Sarkozy sur le manque et les responsabilités de « nos » élites ces dernières décennies – il y a du vrai, mais lui-même et François Fillon ont-ils été constamment retenus loin du pouvoir depuis 1993 au moins ?) – se révèlent impertinents, capables de tête-à-queue et qu’attendus ici, ils fassent décider là…

L’excès de présence [3], de parole [4] et d’image est contre-productif. Plus rien ne ressort, n’est saillant que la silhouette du président. Or, celui-ci vaut par son énergie, sa bonne volonté, presque une probité professionnelle, sa capacité de s’intéresser à tout, de n’être ni lassé ni indifférent, véritable jeunesse et qualité de la « machine » – mais certainement ni par son verbe, ni par sa plume, ni par son physique que chacun de ses prédécesseurs avaient et qu’il n’a pas. Je vois un directeur des Affaires politiques au Quai d’Orsay, s’affairant, dans l’accompagnement du Président de la République de l’époque en voyage officiel à l’étranger, à lire des magazines ; il soulignait à peu près toutes les lignes avec une gamme étonnante de stabilo. Cela donnait un poème de Reverdy, mais certainement pas un instrument de réflexion ou de mémorisation.


Le risque n’est pas que de saturation, il est de perdre le contrôle de l’image et de la communication. L’affaire des tests ADN pour contrôler la sincérité des regroupements familiauax est typique. Elle monte contre le gouvernement les églises [5] et contre la France toute l’Afrique, que le discours de Dakar – le 26 Juillet – avait déjà indisposée [6] . Or, les choses sont moins simples, même si elles montrent Brice Hortefeux sensible à l’immédiate adhésion de Jean-Marie Le Pen au procédé. L’initiative du texte, un amendement, n’a pas été gouvernementale, la procédure est soumise à un juge, elle est un moyen de preuve facultatif et n’est qu’à l’essai. Mais elle correspond trop aux éléments déjà existants du procès d’intention et en fait de l’idéologie prêtée au nouveau pouvoir, du fait des scores respectifs au premier tour de l’élection présidentielle de Nicolas Sarkozy et de Jean-Marie Le Pen. Une concertation, comme il est courant de l’établir, dans le cadre du partenariat euro-méditerranénen [7], aurait peut-être permis d’aboutir à un texte mieux agencé et moins critiqué. C’est toute la question de l’efficacité et du retentissement de décisions unilatérales.

Enfin, les exercices dirigés ne couvrent pas forcément ce dont il est impératif de répondre. Que beaucoup de dirigeants se consacrent davantage à la gestion de leur enrichissement, passe encore dans le « privé », mais que l’Etat et « Bercy » laissent sans contrôle ni curiosité se dérouler la saga qui se découvre chez E.A.D.S. – de la nomination par faveur de Nël Forgeard au délit d’initiés en corporation – met en cause toute la capacité des élus, se disant « responsables », de diriger l’instrument du bien commun. Le Président de la République – bien plus que son Premier ministre, dont l’expérience politique et des affaires publiques, a été longtemps indépendante de la gestion de son avenir – découvre peut-être que les calendriers et les urgences s’imposent davantage qu’on ne les choisit. Réformer l’Etat n’est pas réduire les effectifs de la fonction publique, mais veiller à ce qu’il remplisse toutes ses missions.

        la pierre de touche

Activité, présence, liberté d’examen, attraction inhérente au pouvoir de nommer, Nicolas Sarkozy aura l’adhésion des Français si leur vie quotidienne change en mieux, ou – pour le moins – ne se dégrade pas. La croissance économique, la pression des « prélèvements obligatoires ». A ce second aspect de l’impact de l’Etat et des décisions politiques sur les Français dans leur généralité, François Mitterrand me semble avoir été le plus sensible, c’est sous ses mandatures qu’un effort a été tenté pour la diminuer.

Le cadre européen de toute politique économique nationale suppose notre rigueur et nos efforts si nous voulons être reçus dans nos demandes de dérogation : macro-économie contre initiatives sectorielles et soutiens sociaux. Or, nous venons de donner le spectacle de creuser nos déficits au lieu de les réduire : le bouclier fiscal et la détaxation des heures supplémentaires représentent sans doute entre le tiers et la moitié du déficit budgétaire annoncé (lequel d’ailleurs table sur des prévisions de recettes, c’est-à-dire sur un taux de croissance que l’unanimité des experts nationaux, européens et étrangers jugent surévalué). C’est fou… l’engagement pour 2010 pouvait être tenu si ces promesses électorales ou ces trouvailles de maintenant avaient été mieux ajustées, lors de leur expression ou dans l’application.

Nous n’aurons donc pas l’appui européen pour notre politique économique, telle qu’elle s’est lestée d’emblée.

La croissance économique qui permettrait le retour des finances publiques dans les cadres de la convergence européenne, sans douleur du contribuable ou de l’assuré social français, ne sera pas suffisante. L’analyse selon laquelle il faut « donner » du pouvoir d’achat, donc consentir à de l’inflation, pèche à deux points de vue, dont un seul suffit pour condamner la politique économique voulue par l’Elysée, mais discrètement mise en doute par ceux-mêmes qui doivent la mettre en œuvre, les services de Bercy. Divergence bien plus décisive de l’avenir que celle, trop commentée, entre le palais présidentiel et l’hôtel de Matignon.
La France, ayant perdu l’essentiel de son industrie absorbée-fusionnée par des groupes étrangers et souvent non européens, eux-mêmes à leur tour absorbés (cas d’école : Péchiney puis Alcan), ne peut répondre par elle-même à une reprise de la demande (Valéry Giscard d’Estaing, puis Jean Peyrelevade l’ont démontré à l’occasion des premières esquisses du budget de 2008). La demande engendre structurellement le déficit de notre balance commerciale. Le remède est l’investissement, pas seulement le nombre d’heures travaillées mais la localisation des outils et leur adaptation aux besoins nationaux.

L’inflation – objectif pratique de la pétition pour que l’euro. soit dévalué (on dit autrement : pour que l’euro. ne soit pas aussi fort…) – n’est pas possible sauf à faire sécession de l’ensemble de la construction européenne, c’est-à-dire de l’union par la monnaie unique.

Il y aura donc une autre politique économique ou plutôt, il y en aura enfin une. Les premiers propos tenus par Jacques Attali, chargé d’animer la réflexion sur les voies et moyens de la croissance, évoquent les grands travaux – déjà la panacée des propositions de Jacques Delors qui anticipait l’intégration des pays d’Europe centrale de l’Est dans l’Union européenne. Nous n’avons pas encore achevé la liaison TGV Paris-Strasbourg, nous avons contre-demandé celle entre Lyon et Turin, et nous nous tirerions d’affaire par de grands ouvrages ? L’autre politique économique sera productiviste. L’emploi ne sera pas une charité, la disposition de soi et le temps libre à longueur de vie, le travail choisi ne seront pas le privilège des dirigeants. La solution – comme pour toutes les questions environnementales, aussi – est dans le progrès technologique, donc dans la recherche, donc dans le rôle de l’Etat et une volonté d’indépendance de l’Europe, puisque la recherche dans les pays majeurs a toujours été liée aux budgets de défense… L’économie est subordonnée. Le volontarisme politique – cher à Dominique de Villepin et ressassé par Nicolas Sarkozy, avec la pointe d’égotisme qui lui est propre et sous la plume d’Henri Guaino – n’est pas un vocabulaire ou une décision crispée que les faits ou la rue bouleverse, c’est simplement la dialectique de l’indépendance. De nos jours, elle ne peut être qu’européenne, mais certains Etats doivent y entraîner les autres. La France y reviendra.

La relance de l’investissement suppose que nous nous redonnions les instruments nécessaires. Les banques, l’épargne, les fonds, le droit des sociétés et puisque l’environnement européen – en normes et en capillarité – nous donne un espace différent de celui de nos précédentes reconstruction, usons-en carrément. Le statut de la société européenne et ses conséquences en gestion sociale et en information des salariés n’est qu’un début. Les Pays-Bas sont experts en envergure bancaire et en fonds de pension, leur expérience ne peut-elle s’étendre à l’ensemble des Etats-membres. La syndicalisation et la négociation salariale sont en Allemagne exemplaires parce qu’efficaces et encadrées bienb davantage par le jeu des partenaires que par la norme écrite : nous en sommes loin. Les grèves pour la montre en France dans les transports publics à propos des retraites dont le caractère privilégié n’est pas justifié, suffisamment, aux yeux des usagers. La grève décisive en Allemagne qui peut changer toutes les évolutions salariales. L’actualité impose que le droit soit, lui surtout, comparé. Le comportement des banques – révélé par la crise de la « subprime » - permet aussi la concertation des Etats pour réajuster les outils. Faire des crises un rebond et un moment de réflexion, donc de novation – non selon la théorie (ou la promesse électorale) mais selon une pratique vérifiée dans ses défauts et appelant donc des correctifs que les professionnels aperçoivent mais n’ont pas toujours les moyens, à eux seuls, d’adopter. L’unification monétaire d’une bonne partie de l’Europe s’est faite par de tels cheminements.

        la lacune

Nicolas Sarkozy a ceci de commun – sans l’avoir souhaité – avec Jacques Chirac que les premiers mois de son exercice du pouvoir l’enferment probablement dans un système dont il ne pourra plus s’arracher. En 1995, dominé psychologiquement par son Premier ministre Alain Juppé, le nouveau Président de la République abandonne ce qui pouvait le rendre sympathique à une partie de la gauche : le traitement de la fracture sociale, pour la rigueur à vrai dire rendue nécessaire par l’état des comptes publics dont ni Edouard Balladur, Premier ministre ni Nicolas Sarkozy son ministre du Budget, n’avaient vraiment rendu compte. Il est sanctionné en 1997, mais il a une seconde chance en 2002. Le débat n’est plus économique, mais politique, l’union nationale manifestée par un gouvernement « de grande coalition » comme en Allemagne est dans la logique du second tour de la réélection présidentielle et le referendum sur la Constitution européenne en 2005 le montre rétrospectivement. Ce n’est pas ce qui fut choisi et qui eût probablement laissé à Jacques Chirac, vieilli, la maîtrise de sa succession. Celui-ci a toujours eu beaucoup de rivaux possibles, et paradoxalement davantage depuis qu’il était entré à l’Elysée qu’avant.

Nicolas Sarkozy n’est pas du tout dans le même cas. Sur tous les sujets du moment, il se déclare responsable de l’ouverture du débat et des décisions à prendre. Et seul responsable. Il est face au peuple et au défi de donner à sa revendication constante de prise de ses responsabilités, une sanction. Sa réélection ou pas dans cinq ans ne peut en être une. Quoique déjà l’équilibre du régime des retraites ou de la sécurité sociale, et surtout l’observance par la France des normes européennes en matière de finances publiques ne soient – déjà – plus promis que pour 2012, sans qu’il soit précisé si cela en prélude de la campagne de réélection ou en conclusion de la confirmation du président sortant. L’absence de consultation « intermédiaire » - il est d’avance assuré que les élections municipales et le renouvellement d’un tiers du Sénat, n’auront pas de portée nationale et que ces scrutins n’inspirent en rien les choix gouvernementaux  - fait du quinquennat actuel une délégation totale de pouvoirs pour cin ans. Et au seul président,

Le fond du débat constitutionnel [8] – qu’il a ouvert gratuitement comme pour faire approuver une manière d’exercer ses fonctions déjà en pratique – est bien la place du referendum dans notre vie politique. Surtout depuis que le quinquennat et « l’inversion des calendriers électoraux » a fait coincider – jusqu’à une dissolution aujourd’hui très improbable – les deux mandats présidentiels et législatifs. Que signifie prendre ses responsabilités ? comme le répère à chacune de ses interventions publiques le chef de l’Etat, sinon se soumettre au jugement des concitoyens ? car s’en tenir  à celui de l’Histoire ou de sa conscience propre a du vrai mais aucune portée politique ni juridique. Modifier en profondeur la Constitution, notamment en faisant décider que désormais le Président de la République peut intervenir personnellement devant le Parlement, ce qui minore ou efface la responsabilité gouvernementale, dont la sanction est organisée (la motion de censure, la question de confiance), sera-t-il possible – politiquement et en se référant à de Gaulle – sans débat référendaire, alors même qu’il est écrit et répété qu’un tel débat est ouvert à tous les Français ? La ratification du nouveau traité d’organisation de l’Union européenne – après Maastricht, au résultat si hésitant en 1992, et après le résultat négatif de 2005 – sera-t-elle possible sans débat référendaire. Or, jamais ni le mot ni la perspective ne figurent dans les propos présidentiels. Qu’est-ce qu’une responbabilité sans sanction ? ni contrôle.  

        l’isolement

L’égotisme en paroles et en actes isole. La cote de popularité présidentielle s’est érodée en six semaines beaucoup, beaucoup plus que celle du Premier ministre (plaint, ou compris à mi-mot ?). Je retiens  ces aphorismes présidentiels :
Je pense que si le Président de la République préside, c'est pour décider. Si l'on ne veut pas qu'il décide, eh bien qu'il ne préside pas. Ce n'était pas dans le texte mais cela m'a fait très plaisir de le dire. (Epinal 12 Juillet 2007)
Je suis responsable. Si cela va bien, j'en tirerai toutes les conséquences. Si cela va mal, je dirai aux Français pourquoi cela va mal. Ils sauront au moins à qui la faute et ainsi on recréera un lien de confiance entre le peuple et les dirigeants, lien qui a été gravement atteint par le déficit de responsabilité. (Epinal . 12 Juillet 2007)
Si le chef de l'Etat considère l'architecture comme un sujet secondaire, il ne faudra pas se plaindre que dans cinquante ans il n'y ait pas les projets d'aujourd'hui à montrer (Inauguration Cité de l’architecture et du patrimoine . 17 Septembre 2007).
Je ne fais pas l'exégèse de ce qui se faisait avant, j'essaye d'être cohérent dans ce qui se fait maintenant. (entretien avec le New-Ytork Times . 24 Septembre 2007)

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Pour résumer, le Président de la République – en politique intérieure – est doublement enfermé. Par sa revendication d’être responsable de tous les chantiers qu’il ouvre. Par son choix économique initial, des conséquences duquel seule une très nette croissance économique pourrait l’exonérer. Or, Nicolas Sarkozy ne changera pas de manière tant qu’il sera au pouvoir, et la croissance économique est douteuse, les structures françaises et le passif financier étant ce qu’ils sont. Il avait le choix d’une autre manière sans rien abdiquer de sa propension à s’impliquer et à décider personnellement. Il avait le choix de donner des gages en orthodoxie financière.
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II – Politique extérieure


S’attaquant à tout sans tabou (terme fréquent) en politique intérieure – notamment aux instiututions, en pratique et dans leur lettre –, le nouveau Président de la République est a priori de plain-pied avec un monde qui change. Mise en harmonie de la politique française, réexamen des dogmes, ajustement des outils ? Le changement français n’est pas de cet ordre. C’est un changement de priorité, c’est, ce n’est pas pour elle – telle que la pense et la souhaite Nicolas Sarkozy -

Or, le décalage déjà avoué en politique intérieure où l’élu du 6-Mai ne se sent pas de la même génération que la plupart de ses partenaires, même s’il n’en est pas forcément le cadet, se retrouve en politique extérieure. Nicolas Sarkozy n’anticipe pas un nouvel état du monde, il n’analyse pas les situations ni l’ensemble, il vise les pays, les personnes et les sujets. Comme tout Président de la République prenant ses fonctions, il croit que la politique extérieure n’a d’antécédent que l’inertie ou l’aboulie, la timidité de ses prédécesseurs. Et que sa personnalité a lui peut changer presque toutes les donnes. Qu’en somme un nouveau venu ou un amateur a plus que sa chance, il est une providence. La remarque que me faisait Maurice Couve de Murville, au début de notre relation de trente ans. Or la politique extérieure est un métier, une expérience, un réalisme, une prudence de tous les instants parce qu’elle est régie par deux principes : il y a des rapports de puissance, mais la puissance n’est pas que matérielle et elle a ses moments, axiome du général de Gaulle, et – deuxièmement – la considération pour l’adversaire ou le partenaire autant que la posture adoptée envers lui sont décisives.

En politique intérieure, on peut biaiser et en imposer avec les moyens du pouvoir politique et en misant sur ce qui naguère faisait l’obéissance ; en relations internationales, on est que ce que l’on est. L’inculture peut paraître de l’énergie et du style direct en politique intérieure, en politique extérieure c’est méconnaître autrui, n’avoir pas le sens du relatif et ne projeter que soi, donc être autiste. Le manque de recul et de maturité se pardonnent entre compatriotes puisqu’il y a toujours l’évocation du scrutin le plus récent et la perspective du prochain. Entre étrangers, il y a jauge mutuelle. Le cas d’école est la rencontre de Konrad Adenauer avec le général de Gaulle. Le premier appréhende un nationaliste, anti-européen et mal disposée envers l’Allemagne. Le second est demandeur de relations bilatérales confiantes, ce qui n’a jamais été la posture française depuis 1871 : toujours, nous avons cherché des alliances et la coalition, sauf – entre 1928 et 1931 – la tentative, trop tardive, d’Aristide Briand et de Pierre Laval. La chance veut que l’Allemand a perdu son partenaire : John Foster Dulles, alors mourant, et dont la fermeté face à l’Union soviétique lui est essentielle. C’est cette fermeté que n’a pas le successeur de celui-ci Christian Herter et que va montrer aussitôt de Gaulle à propos des prétentions de Moscou de réviser le statut de Berlin. Psychologiquement, il y avait une place à prendre. Maurice Couve de Murville, se trouvant ambassadeur à Bonn depuis notre équipée de Suez, a pris la mesure du Chancelier, il continue de visiter le Général depuis qu’il a travaillé avec lui à Alger. Il se porte donc fort de l’autre devant chacun. Reste le charme, il opère. Vient la fondation, elle est aujourd’hui indépendante des circonstances, des élections, des gens [9].

Ma conviction est que – dans la nouvelle configuration des relations internationales qui s’est faite ces mois-ci et qui va  se pérenniser, même si Hilary Clinton l’emporte dans treize mois – l’homme à prendre et qui est demandeur, s’appelle Wladimir Poutine. Il est de la Russie la plus proche de l’Europe, il ambitionne pour la Communauté des Etats indépendants une organisation inspirée de notre Union européenne. Son pays commande tout notre voisinage oriental, la sécurité d’une bonne part de nos approvisionnements énergétiques. Une relation intime est possible – d’homme à homme, le président français et lui ayant en commun l’énergie, la ténacité, la puissance de caractère, le franc-parler. Il faudrait la manifester, la privilégier. Rôle de la France, travailler à sécuriser la Russie qui par les intégrations successives de ses anciens satellites du COMECON et même de l’ancienne Union soviétique, dans l’Union européenne et dans l’Alliance atlantique, ne peut que se sentir agressée, cernée, amoindrie : évidemment, avoir consenti en concertation atlantique au « bouclier anti-missile » disposé par les Américains en Pologne et en Tchécoslovaquie, est un contre-sens … – lui permettre donc de se consacrer à sa reconstruction intérieure (économique et enfin démocratique) et à l’édification d’une nouvelle stratégie en Asie face à la Chine et face à l’intégrisme. Gains de la France, avoir apaisé la frontière orientale de l’Union et celle des Etats-membres les plus tournés vers les Etats-Unis par crainte du retour russe – , gagner un partenaire industriel pour refaire sa propre industrie : les propositions russes au moment de l’attaque de Mittal-Steel contre Arcelor, ce qui, avec des vues larges mais n’est peut-être pas encore impossible, peut se bâtir pour E.D.F., G.D.F. et Suez avec les Italiens et les Russes, à l’avantage aussi de nos pétroliers. Avec intelligence, ce n’est pas incompatible avec le nouveau cours de la relation franco-américaine qu’a décidé le Président de la République, si nous ambitionnons, au-delà du suivisme actuel, un partenariat influent. Ce fut, autrefois, le discernement français qui appela de notre désastre de 1870-1871 à l’alliance franco-russe, apparemment contre-nature ou aventurée.


        le changement vis-à-vis des Etats-Unis

Rupture sans crainte des tabous, le changement voulu par Nicolas Sarkozy, en politique extérieure – assez équivalant en symbolique, et donc par rapport au général de Gaulle – porte sur la relation avec les Etats-Unis. Que celle-ci change pour être d’expression plus amène et se nourrir d’un dialogue plus confiant serait positif, si c’était la conclusion d’un examen circonspect de la situation du monde et des rapports inter-étatiques. Or, c’est au contraitre qu’a procédé apparemment le nouveau Président de la République sans réflexion ni méditation préalable, uniquement par conviction personnelle – et aussi déduction des pertes et profits de l’attitude ambivalente de Jacques Chirac. Au lieu qu’un état des choses et une claire articulation des intérêts substantiels de la France fasse examiner à fond nos engagements multilatéraux et nos relations bilatérales et qu’en soient déduits les changements nécessaires, nous sommes désormais prisonniers de la dialectique d’un seul changement, celui de nos relations avec les Etats-Unis.

Le changement est certes marqué par plusieurs tête-à-tête avec le président américain, par les vacances prises aux Etats-Unis – les vacances présidentielles à l’étranger n’ont pas de précédent en France – et les points de presse qui les commentent. Les propos tenus à l’installation de la commission dite du « Livre blanc sur la défense » (23 Août) ne l’annoncent pas, et – avec une prudence exceptionnelle depuis sa prise de fonctions qu’il n’a manifesté jusqu’à présent sur aucun autre sujet – le Président de la République envoie au feu le nouveau ministre – qui se veut explicitement en rupture avec Michèle Alliot-Marie et qui représente un « groupe-charnière » dans la majorité, celui des élus de l’ex-U.D.F. hostile à la démarche sécessionniste de François Bayrou : «  Nous sommes trop souvent ceux qui chipotent et qui barguignent, comme si nous voulions donner le sentiment de vouloir empêcher l'Otan de se transformer … Ma conviction est que l'Europe de la défense ne progressera pas si nous ne changeons pas de comportement politique au sein de l'Otan ». La dialectique est très habile : c’est par souci d’indépendance européenne que l’on abandonnerait ce qu’il restait de leur seule position indépendantiste d’un Etat-membre de l’Union, hors les quatre Etats neutres. [10] Jacques Chirac l’avait tenté, l’échec de la dissolution de 1997 fit couper court. « Pourquoi voudriez-vous que nos partenaires perdent confiance dans un système qui a assuré la paix depuis cinquante ans (l'Otan), pour un système qui n'existe pas encore (la défense européenne) ? ». Le propos est bien plus net que les premiers pas esquissés par le Président de la République devant la conférence des ambassadeurs [11] : c’est en s’appuyant sur ce que petit à petit, avec Jacques Chirac, la France a laissé s’organiser, que la réintégration de l’Organisation intégrée est présentée non comme une décision, mais comme la logique-même, donc sans alternative. Et naturellement, sauf si l’opposition les demande, sans débat parlementaire, sans consultation apparente. « Je ne fais pas l'exégèse de ce qui se faisait avant, j'essaye d'être cohérent dans ce qui se fait maintenant. » (24 Septembre, en entretien avec le New-York Times). Et d’invoquer avec logique le Kosovo et l’Afghanistan (comme si dans ce dernier pays une prise d’otages français, pendant notre campagne présidentielle, n’était pas un avertissement).

A mon sens, la question de l’Alliance atlantique, telle que celle-ci a évolué – habillage juridique pour l’extension au théâtre mondial d’une bataille non conventionnelle contre un ennemi non étatique, ce dont Jacques Chirac, dans son discours à l’Ile-Longue (19 Janvier 2006) avait pris acte, maladroitement et alors qu’il n’avait plus de crédibilité politique – n’est plus que secondaire. En revanche, l’essentiel pour la France (et l’Union européenne en tant que telle pour son image dans le monde et pour ne pas se gaspiller selon des intérêts qui ne sont pas les siens) est de ne pas aller, par la remorque des Etats-Unis, au rebours des évolutions souhaitables et prévisibles. Or, notre rentrée dans l’O.T.A.N. n’est que l’exposé des motifs d’une relation bilatérale où les vues communes sur la situation du monde l’emportent de beaucoup sur les vues jusques-là françaises. La France devient celle qui exhorte ses partenaires européens à comprendre et suivre les Etats-Unis…

Une succession de prises de position témoigne d’une analyse analogue à celle des Etats-Unis, à commencer par celle du terrorisme entièrement à la charge des intégristes et islamistes. A propos de la sortie de crise en Irak ou de la manière d’amener l’Iran à quia, il n’y a plus de différence française vis-à-vis de Washington ; c’est de plusieurs de ses partenaires, notamment de l’Allemagne, que se distingue désormais Paris.

        l’abandon de la priorité européenne

Deux positions – de politique intérieure – le manifestent.
La négociation d’un nouveau traité européen, destiné à remplacer le texte refusé par referendum en France et aux Pays-Bas, ne se conclura pas, de notre côté par un débat référendaire. L’enjeu n’est donc plus majeur, ou plutôt il est expressément voulu que l’enjeu ne soit plus considérable et que la suite – exactement comme cela avait été le reproche constant des « souverainistes » - puisse se faire dans le quasi huis-clos d’un vote parlementaire, acquis d’avance. S’il y a finalement échec, ce ne sera donc pas le fait de la France, mais de ceux des Etats-membres dont les gouvernants auront gardé le courage et la logique politiques de soumettre le texte au referendum : la Grande-Bretagne et le Danemark. La France n’est plus le pays entraînant l’entreprise, elle ne l’empêche pas certes, mais elle ne la nourrit plus. Mentalement, c’est l’abstention. L’Union importe moins que ses Etats-membres, elle est seulement mécanismes. Contestables quand ils rappellent à l’ordre. Ce qui a pour effet – sans doute non souhaité – d’ôter toute légitimité à ses critiques de la Banque centrale européenne, d’autant qu’elle n’observe pas les disciplines convenues.

Le dédain des critères de convergence macro-économique concourt évidemment aussi à entériner une nouvelle lecture des traités. Déjà, la ratification des textes par une majorité des Etats-membres n’a pas été prise en compte, les engagements fondateurs de l’euro. ne le sont plus. Les montages de ce qu’il nous reste d’actifs industriels propres, commencés sous Dominique de Villepin, ne sont pas européens.

Sans doute, Nicolas Sarkozy honore-t-il la construction européenne de la proposition méthodologique qui fait florès, maintenant, chez nous : une commission de réflexion [12]. La dialectique est atlantique, elle n’est plus européenne sous prétexte que s’opposer à la première handicaperait la seconde. Il n’est plus vu que l’Europe n’a de sens et d’avenir – en tant qu’objectif politique consensuel, pas tant des gouvernants que des opinions et des peuples – que si elle est indépendante. L’indépendance est de nos jours une émancipation, les peuples censément décolonisés le savent. Emancipation d’abord mentale.

Sauf circonstances qui l’en empêcheraient, le nouveau Président de la République veut au contraire de son indépendance et de sa différenciation, une Union européenne fusionnelle avec la communauté atlantique de fait, générée par l’obsession des peuples européens d’être protégés, et soudainement renforcée et considérablement élargie par l’implosion soviétique. En ne voulant pas ou en ne comprenant pas l’urgence de l’alliance franco-russe – à privilégier, au lieu de la litanie des partenariats stratégiques qui sont l’accompagnement européen de la nouvelle géographie mondiale, tous à pied d’égalité et de formes à peu près analogues – Nicolas Sarkozy ne peut apercevoir la dernière issue indépendantiste de l’Union européenne et la voie – actuelle – d’une différenciation avec les Etats-Unis.

Emancipation des peuples, de leurs dirigeants… Faut-il supposer une psychologie de l’élu du 6-Mai telle qu’au spectacle de douze ans d’un mauvais gouvernement (quinquennat de gauche avec Lionel Jospin, compris), il cherche indistinctement à s’émanciper et à nous émanciper d’une mauvaise forme, et que ce mouvement entraine le fond ? Rapport de Nicolas Sarkozy à Jacques Chirac, non dit mais ressenti par les Français pendant tout le précédent quinquennat qui fut celui de sa campagne électorale… mais dans sa persévérance à citer de Gaulle de façon si ambivalente, responsable des tabous ou fondateur de ce qui fait encore aujourd’hui la cohésion et la force nationale, le nouveau Président de la République avoue un complexe que n’avaient pas ses prédécesseurs. S’en tirer par la page blanche où l’on écrira selon de nombreuses invitations à la réflexion collective, est-ce un commencement ? Culture de résultats : hantise de l’aboutissement, ou liberté d’examen : ambition du commencement ?

A l’égal, en tout cas, du général de Gaulle – est-ce conscient ? ou est-ce la mécanique de la politique ? – Nicolas Sarkozy pratique la scène intérieure et la scène extérieure de la même façon, ce qui n’était pas courant entre 1969 et 2007. Sera-ce pour le meilleur ?


*

*       *


Je n’écris pas cela par nostalgie d’une autre époque et d’autres présences politiques, mais parce que j’observe qu’à suivre sur leurs terrains actuels les Etats-Unis : question d’Israël et du proche-Orient, avenir de l’Irak, nucléaire iranien, nous retardons. Les Américains pensent déjà à d’autres sujets, non qu’ils aient excellé à traiter ceux-ci. Ces dossiers sont fermés à la Maison-Blanche, au moins par prétérition. La Libye et la Corée du nord ont été réglées. Les vrais sujets sont les adversaires de taille. Le plus redoutable a été fasciné dès sa naissance : l’Europe, parce qu’elle seule a l’autorité morale pour prendre l’Amérique à revers, en lui opposant à elle-même les valeurs qu’elle invoque, qui sont censées communes aux deux rives de l’Atlantique, mais ne sont pratiquées que d’un côté. Apparaissent la Chine et l’Inde. Chacune de ces énormes entités se présente d’une manière tellement insaisissable par leur mimétisme et par leur mystère, par le jeu qu’elles ont compris pouvoir jouer, tout à leur avantage, dans la « mondialisation » - la Chine fait de la finance et du commerce extérieur, l’Inde de l’industrie et de l’intelligence – qu’elles ne paraissent menaçantes qu’en termes de concurrence. Les Etats-Unis s’entendent avec la première pour le financement de leurs déficits courants, et avec la seconde sur le nucléaire. Comme la Chine et l’Inde n’entrent pas dans la catégorie de l’ennemi terroriste, la relation est d’apparence amicale. Mais pour les Etats-Unis, tout concurrent à leur hégémonie est un ennemi, du moins la doctrine de Monroë, tirée de sa seule application à la géographie continentale de 1823, peut-elle se lire ainsi. Etre prêt à soutenir une coalition mondiale ou inciter – par tous moyens ? – le reste de la planète à adopter les modes américains de conduite en société sont sans doute les deux versions du même autisme. Ou les deux formes de l’hégémonie. Les présentations sont parfois plus honorables que d’autres : John Kennedy, il y aura bientôt cinquante ans, Hilary Clinton peut-être bientôt. Il y a aussi des amendes honorables, ainsi le récent revirement du discours sur le changement des climats. Mais la médication fondamentale n’a pas encore joué, celle d’une conversion de la caste gouvernante outre-Atlantique au meilleur de l’esprit américain qu’illustrent de nombreuses individualités. Cette opposition domestique non encartée aux politiques continues d’une administration à l’autre se désole sans doute quand lui fait défaut l’espérance de l’alternative européenne. Si de Gaulle eut de l’autorité morale, même aux Etats-Unis, naguère, c’est qu’il avait les mots et la pratique de cette alternative, au moins à l’échelle française./.






disponibles par courriel sur demande :


15 notes sur la campagne et l’élection présidentielles,
rédigées du 12 Novembre 2006 au 8 Mai 2007

journal réfléchi

14 . 20 Mai 2007
Le point de départ
Les commencements
Les contradictions inévitables
Les lacunes institutionnelles

25 Mai 2007
Quelques « grilles de lecture »
Le pouvoir personnel ou « l’homme d’une nation » ?
La sécurité (du pouvoir)
Le concret, le terrain, les urgences : qu’est-ce à dire et à faire ?

31 Mai . 5 Juin 2007
Nouvelle génération et antécédents consensuels
Une périlleuse prétention
La probation diplomatique
La quadrature du cercle ?
15 . 16 Juin 2007
La manière du candidat ne peut être celle du président de la République
La démocratie de gouvernement
Les débuts de « l’action »

17 . 24 Juin 2007
Déblais…      
Une claire distribution des rôles et des stratégies, au pouvoir et dans l’opposition
La fausse obligation de hâte
Le mode de scrutin pour désigner les députés  l’Assemblée Nationale est-il adapté ?

6 . 10 Juillet & 12 Septembre 2007
Notre pays, notre temps, notre monde – banalités ?
Notre pays, notre temps, notre monde – ce qui change
Les paradoxes qui demeurent
Les précédents ne valent que pris dans la période Cinquième République         
Concept et pratique de la carrière politique - Logique républicaine et accélération des dévoiements
Difficulté de l’émergence d’une nouvelle éthique des grands patrons français

19 Septembre 2007
Des bons points        
Des mauvais points
Des indices
Des sujets d’inquiétude


[1] - les deux sondages, celui du 19 Septembre, le BVA publié par Orange et le par Le Figaro
[2] - Bernard Kouchner, devant la presse diplomatique, ce 4 Octobre, selon l’A.F.P. : M. Kouchner s'est aussi penché sur son propre avenir de ministre d'ouverture socialiste au sein d'un gouvernement de droite, en se demandant s'il serait encore là pour la présidence française de l'UE au second semestre 2008. "On sait jamais, je ne serai peut-être pas encore viré", a-t-il dit, au détour d'une phrase, avant de conclure: "Je suis toujours sur les mêmes positions, ce qui d'ailleurs ravit le président. Sinon, il me renverrait immédiatement".
 
[3] - politique PARIS (AFP) - 27/09/07 14:08
Sarkozy beaucoup plus présent dans les JT que Chirac en début de mandat
L e président de la République Nicolas Sarkozy est apparu bien plus souvent dans les journaux télévisés que son prédécesseur Jacques Chirac, révèle jeudi le baromètre Ina'Stat, qui compare les quatre premiers mois des mandats des deux présidents.

Selon l'étude de l'Ina'Stat, le baromètre des journaux télévisés de l'Institut national de l'audiovisuel (Ina), Nicolas Sarkozy est apparu à l'écran 224 fois de mai à août 2007, quand Jacques Chirac n'était apparu que 94 fois de mai à août 1995 et 75 fois sur la même période en 2002.

Ce classement est établi à partir du nombre de passages des personnalités (présences par l'image et la parole) dans les JT, quelle qu'en soit la forme (invité plateau, allocution, déclaration publique, entretien...).

Ont été prises en compte les éditions du soir diffusées par les six chaînes nationales hertziennes, sur les quatre premiers mois de mandat des présidents élus en 1995, 2002 et 2007. Ina'Stat présente dans ce baromètre les scores des cinq personnalités les plus présentes - y compris ex-aequo - dans les JT.

Sur la période de mai-août 2007, Ségolène Royal arrive derrière M. Sarkozy, étant apparue 100 fois, alors que sur cette même période de 1995, Lionel Jospin était passé 33 fois.

Arrivent ensuite le Premier ministre François Fillon (91 fois de mai à août 2007 contre 96 pour Alain Juppé, Premier ministre, de mai à août 1995, et 99 fois pour Jean-Pierre Raffarin), le premier secrétaire du PS François Hollande (76 fois, contre 48 fois en 2002) et la garde des Sceaux Rachida Dati (47 fois).

Sur le seul mois de mai 2007, l'actuel président de la République est apparu 79 fois, alors que son prédécesseur n'était apparu que 34 fois dans le mois de son élection en 1995, et 43 fois en mai 2002.

En juin 2007, M. Sarkozy était présent à l'écran des JT du soir 46 fois, contre 23 fois pour M. Chirac en 1995. En juin 2002, M. Chirac ne faisait pas partie des cinq personnalités les plus présentes et c'est François Hollande qui arrivait en tête (25).

En juillet dernier, M. Sarkozy est apparu 55 fois. Jacques Chirac affichait un score de 32 en 1995 et 19 en 2002... derrière le ministre de l'Intérieur d'alors, M. Sarkozy (30 fois).

Toujours en juillet, les occurrences de M. Fillon étaient de 34 fois contre 31 fois pour M. Juppé en 1995 et 30 fois pour Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre en juillet 2002.

[4] - sur le site internet de l’Elysée, je compte 85 pages de références pour Jacques Chirac en douze ans et déjà 7 pages pour Nicolas Sarkozy entre le 16 Mai et le 25 Septembre 2007

[5] - l’intervention, le 3 Octobre, à France-Infos. de Mgr. Bérenger, évêque de Saint-Denis responsable pour l’épiscopat français de la « mission universelle de l’Eglise »

[6] - le débat publié par Jeune Afrique n° 2430 des 5-11 Août 2007 et l’initiative de Mme Adame Ba Konaré (épouse de l’ancien président de la République du Mali, devenu président de la Commission de l’Union africaine) de faire écrire une réponse collective – scientifique - au président français sur la mémoire africaine,        ibid. n° 2438

[7] - le « processus de Barcelone », initié le 28 Novembre 1995 et que peut développer la proposition d’Union méditerranéenne, lancée par le nouveau Président de la République
[8] - j’ai sollicité – en vain – de participer d’une manière ou d’une autre au travail du comité de réflexion installé le 18 Juillet et qu’anime Edouard Balladur. D’ici peu, j’adresse une note à chacun de ses membres que je communiquerai à ceux du Conseil constitutionnel et naturellement au président régnant et au Premier ministre.  Le matériau de base : la « commande présidentielle », est joint à la présente observation
[9] - je travaille à la biographie de Maurice Couve de Murville, Un secret français et écrirai en marge les portraits de Cinq Français et l’Allemagne (Caillaux, Briand, Laval, de Gaulle, Mitterrand)
[10] - propos tenus lors de la 5ème Université d'été de la Défense, réunie à Toulouse : 10 Septembre
[11] - « Ces progrès décisifs de l'Europe de la défense que j'appelle de mes vœux ne s'inscrivent absolument pas dans une compétition avec l'Otan. Cette Alliance atlantique, faut-il le rappeler, c'est la nôtre : nous l'avons fondée, nous en sommes aujourd'hui un des principaux contributeurs. Sur 26 membres, 21 sont membres de l'Union. Opposer l'Union à l'Otan n'a aucun sens parce que nous avons besoin des deux. Mieux : je suis convaincu qu'il est dans l'intérêt bien compris des Etats-Unis que l'Union européenne rassemble ses forces, rationalise ses capacités, organise sa propre défense de façon indépendante. Nous devons progresser avec pragmatisme, et en même temps avec ambition, sans a priori idéologique, avec pour unique obsession notre sécurité. Les deux mouvements sont complémentaires. Je souhaite que dans les prochains mois nous avancions de front vers le renforcement de l'Europe de la défense et vers la rénovation de l'Otan et donc de sa relation avec la France. Les deux vont ensemble. Une Europe de la défense indépendante et une organisation atlantique où nous prendrions toute notre place. » A l »’occasion de la conférence des ambassadeurs, le 27 Août
[12] -  « L'Europe étant désormais sortie du blocage du chantier institutionnel qui durait depuis dix ans, le moment est venu de poser la question de l'avenir du projet européen. Je souhaite que, d'ici la fin de cette année, soit créé par les Vingt-Sept un comité de dix à douze sages de très haut niveau, à l'image de ceux présidés par Werner, Davignon et Westendorp ou du comité Delors, pour réfléchir à une question qui pour être simple n'en est pas moins essentielle : " quelle Europe en 2020-2030 et pour quelles missions ? ". Les sages devraient remettre leurs conclusions et leurs propositions avant les élections européennes de juin 2009, pour permettre au Parlement nouvellement élu et à la prochaine Commission de disposer du fruit de leurs travaux, en complément du Traité simplifié et du travail de rénovation des politiques de l'Union et de son cadre financier. » - allocution devant la conférence des ambassadeurs, le 27 Août

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