jeudi 31 décembre 2015

les voeux du général de Gaulle - exemples 1961 . 1962 . 1963 - source INA


fresques.ina.fr/de-gaulle

31 Décembre 1960
Résumé :
Le général de Gaulle présente aux Français ses voeux pour l'année 1961, année qu'il envisage avec confiance malgré les temps troublés. Il souhaite que tous les Français profitent du progrès économique et social. A l'extérieur, il critique l'attitude de l'URSS "colonisatrice" et "agitatrice", et formule de grandes ambitions pour l'Europe. Il évoque ensuite la question algérienne, et demande aux Français, appelés à voter par référendum le 8 janvier, d'approuver le principe de l'autodétermination. Il laisse planer la menace de son départ en cas de réponse "négative ou confuse", et appelle à un "oui franc et massif".

Françaises, Français, je souhaite en notre nom à tous une bonne année à la France.

Je le fais en toute confiance, non point que 1961 doive être une année sans épreuve, au contraire, rien n'annonce qu'elle se passera dans la quiétude, mais si l'univers est troublé, la France, elle, ne l'est pas. Solide, laborieuse, cohérente, je crois que jamais, en dépit des difficultés, elle ne fut plus capable de saisir ses propres chances et d'être utile aux hommes et à la paix. Un grand peuple, pour avancer, va forcément pas à pas, et à travers beaucoup d'obstacles, mais l'essentiel est qu'il marche vers un but bien défini et qu'il suive constamment sa ligne. C'est notre cas et nous avançons. Aussi notre pays, moi compris, va-t-il commencer l'année avec l'esprit d'entreprise et rempli de sérénité.

A l'intérieur, grâce à des institutions rendues plus stables et plus efficaces et sur la base de l'équilibre bien établi de nos finances, de nos échanges, de notre monnaie, nous poursuivrons le vaste développement scientifique, technique, scolaire, économique dans lequel nous nous sommes engagés qui est le chemin de la prospérité, du rayonnement, de la puissance et qui ouvre la carrière à une jeunesse multipliée. Mais tout comme cela s'est passé en 1960, il s'agit qu'une élévation du niveau de vie de tous corresponde à cet accroissement de l'activité du pays. Dans le courant de 1961, ce doit être le cas notamment pour les jeunes familles et pour les vieilles gens. En même temps, il nous faut continuer à baisser les barrières qui séparent les catégories sociales. Chances égales donnée aux jeunes, par l'enseignement commun, Promotion plus ouverte au long de l'échelle de la société, participation accrue des travailleurs à la marche des entreprises, accession plus large des organisations du travail et de la technique aux responsabilités régionale et nationale de l'économie française. Tel est notre but et c'est ce que nous voulons, c'est en finir avec les séquelles périmées de la lutte des classes d'autrefois, c'est intéresser au développement du pays, tout ce qui contribue et c'est accélérer le progrès par cet engagement général.

Au dehors, nous sommes confrontés avec les grands problèmes qui dominent l'univers, mais sans nous laisser troubler par les cumuls que cultivent tel ambitieux ou tel démagogue. C'est ainsi que nous tenons pour naturel et en soi pour souhaitable et pour salutaire, le grand mouvement qui emporte nombre de peuple d'Asie, d'Afrique, d'Amérique en retard sur notre siècle vers l'affranchissement et vers le développement. C'est de tout coeur qu'aujourd'hui, nous adressons nos souhaits aux jeunes républiques africaines et à la république malgache qui, venant de l'union française, pratiquent avec nous en toute indépendance une coopération féconde et amicale. Nous ne confondons nullement cet élan vers la liberté avec la xénophobie où se ruent les dirigeants de certains autres Etats nouveaux dépassés par la charge qu'ils doivent assumer. Nous espérons fermement que chez tous ces peuples, l'ordre et le progrès s'instaureront en définitive, malgré l'empire soviétique qui non content de coloniser 40 millions de musulmans asiates et caucasiens, et d'asservir une bonne douzaine de peuples qui lui sont complètement étrangers, encourage et exploite toutes les secousses pour prendre pied dans les pays troublés. Nous ne nous laisserons pas paralyser par cette odieuse agitation.

Nous ferons donc en 1961 ce que nous avons à faire, aider à construire l'Europe qui, en confédérant ses nations, peut et doit être pour le bien des hommes la plus grande puissance politique, économique, militaire et culturelle qui ait jamais existé. Aider cette Europe rassemblée et l'Amérique sa fille, à réorganiser leur alliance, de manière à mieux défendre le monde libre et à agir en commun par toute la terre. Aider à acquérir la libre de disposition d'eux-mêmes, ceux, les peuples qui y aspirent et notamment ceux qui sont courbés sous le joug totalitaire. Aider à prendre leur part du progrès ceux qui en sont écartés. Aider l'Ouest et l'Est à en venir à la détente et au désarmement, pour peu que l'empire soviétique cesse de manier les torches incendiaires, tout en lançant pour la montre des vols de colombes épouvantées.

Pour l'Algérie, nous voulons que 1961 soit l'année de la paix rétablie afin que les populations puissent décider librement de leur destin et pour que naisse l'Algérie algérienne. A cette Algérie-là qui se gouvernera elle-même qui fera leurs parts et garantira leurs droits aux diverses communautés et qui sera unie à la France dans les domaines où celle-ci peut l'aider, nous offrons d'avance notre concours pour son développement, compte tenu non point des mythes, des regrets, des rancunes mais des facteurs réels du problème, c'est là la solution valable. Et j'invite en particulier la communauté de souche française d'Algérie, à se débarrasser décidément des troubles et des chimères qui la couperaient de la nation. Et, non seulement admettre ce que le pays va décider mais en faire son affaire, à saisir la chance nouvelle qui est offerte à sa valeur et à son énergie, car l'Algérie a besoin de la communauté française et la France a besoin d'elle. En Algérie, bien entendu, quoi qu'il arrive, la France protégera ses enfants, dans leur personne et dans leurs biens, quelle que soit leur origine, tout comme elle sauvegardera les intérêts qui sont les siens.

Françaises, Français, je vous le demande, donnez au projet qui vous est soumis une approbation immense. D'abord parce que c'est le bon sens, mais aussi pour cette raison que l'enjeu dépasse de beaucoup les préférences théoriques, les intérêts particuliers, les attachements partisans et que jamais ne fut plus nécessaire notre cohésion nationale.

Car s'il devait arriver par malheur que la réponse du pays fut ou négative ou indécise, en raison d'une faible majorité ou marquée par beaucoup d'absention, quelle conséquence résulterait de cette impuissance et de cette division ! Quelle excitation en recevrait les chercheurs d'aventure d'une part et, d'autre part les tenants de la subversion ? Quel prurit agiterait les clans du doute, de la hargne, du dénigrement en Algérie ? De quel découragement seraient saisis les raisonnables, de quel impulsion les furieux, dans le monde, quelle conclusion désastreuse en serait tirée quand à la capacité de la France, d'assumer la responsabilité des affaires qui la concerne, et à moi-même, vous le savez bien quel coup serait ainsi porté m'empêchant de poursuivre ma tâche.

Au contraire que le référendum soit positif et soit éclatant ! Voilà la nation, son gouvernement, son parlement, son administration, son armée bien fixée sur la route à suivre et sur le but à atteindre. Voilà les Algériens bien éclairés sur leur destin, voilà l'étranger bien prévenu que la France sait ce qu'elle veut et me voilà, moi-même, raffermi et plus fort pour être le guide de la France et pour élargir la porte de la paix et de la raison.
Françaises, Français, aujourd'hui tous ensemble, nous offrons nos voeux à la France. Le 8 Janvier, nous lui offrirons le oui franc et massif de notre espoir et de notre foi.

Vive la République !

Vive la France.

31 Décembre 1961
Résumé :

Le général de Gaulle présente ses voeux aux Français pour l'année 1962. Après avoir rappelé la stabilité retrouvée des institutions, il évoque la résolution prochaine du conflit algérien, puis il annonce que la modernisation du pays va se poursuivre.


Voici l'année nouvelle ! La France en a vécu beaucoup. Cependant, elle accueille celle-ci sans manquer à l'espérance. C'est qu'en effet, elle sait où elle en est, ce qu'elle vaut et ce qu'elle veut.

Il y aura bientôt quatre ans, que quittant le chemin du déclin, elle a pris la route qui monte. Cela eut lieu, qui peut l'oublier, en raison de certaines évidences qui s'imposèrent à la Nation. Impuissance du régime des partis, qui, après nous avoir conduit au désastre de 1940, avait, une fois le péril passé, recommencé ces jeux stériles. Abdication de l'Etat devant la menace de guerre civile dressée à l'occasion de l'affaire d'Algérie. Imminence d'une faillite monétaire, financière et économique, entraînée par une longue suite de faiblesse et de laisser-aller.

Je ne dirais certainement pas que depuis lors, nous ayons vécu dans une complète tranquillité et une entière satisfaction. Aussi bien, ce n'était pas possible, parce que des forces énormes sont à l'oeuvre qui bouleversent l'univers, et nous secouent nous-mêmes, à chaque instant.

C'est ainsi que les ambitions du système soviétique, les excitations qu'il prodigue à tout ce qui sur la terre tend au désordre et à la haine. Le danger de guerre atomique qu'il fait planer sur le genre humain, les interventions provocantes qu'il prodigue, à mesure de ces drames intérieurs, et notamment aujourd'hui, pendant cet espèce de Thermidor, où il affecte de condamner la longue série passée de ses crimes et de ses abus, sans renoncer à leur cause qui s'appelle le totalitarisme. Tout cela nous oblige à nous mettre en garde, à pourvoir à notre défense, à maintenir des alliances difficiles. En outre, l'agitation chronique d'un grand nombre de peuples d'Asie et d'Afrique, parvenus à l'indépendance ou sur le point d'y parvenir, sans posséder les moyens de subsister et de se développer. Et d'autant plus portés à la démagogie xénophobe, remplissent la terre de tumultes bruyants. D'autre part, à l'intérieur de nous-mêmes, notre grande entreprise de rénovation nationale remue inévitablement, les intérêts particuliers, les routines et les partis pris. Et enfin, l'acheminement du problème algérien vers une solution de bon sens, ne laisse pas de provoquer dans un groupe criminel des révoltes, hier ouvertes, et aujourd'hui concentrées en chantage et en assassinats.

Mais quelles que soient les difficultés que comporte par le temps qui court, la marche de la Nation française, vers la prospérité, vers la puissance et le redressement de son action internationale, elle n'en continue pas moins son oeuvre, avec un succès évident et une constance que rien n'ébranle. A cet égard, le contraste est saisissant par rapport à la confusion où naguère, elle se débattait.

Si l'Etat en d'autres temps s'est incliné devant les sommations que certains éléments dressaient contre lui, pour l'emporter, c'est un fait que depuis 3 ans et 7 mois, le pouvoir responsable, malgré tout, n'a pas changé de route. Assurément, le caractère dont ont pu le marquer les évènements de l'histoire, contribue à sa solidité. Mais il la tient surtout de l'unité nationale établie autour de lui.

Si dans l'ordre politique, depuis janvier 1947, jusqu'en mai 1958, soit en l'espace d'environ onze ans, se succédèrent vingt-deux cabinets, ensuite notre pays, depuis presque 4 années, a eu un seul gouvernement. Et au cours des trois ans écoulés, depuis que fut mise en oeuvre l'actuelle constitution, je n'ai nommé qu'un Premier Ministre, une pareille stabilité, et certainement facilitée par l'esprit et par le texte des nouvelles institutions, mais elle n'est possible, en somme, que parce qu'elle répond à la volonté du pays.

Si dans le domaine social on constate, que pour 9 millions d'ouvriers français, il y a eu, par suite des conflits du travail, sous les régimes précédents, chaque année, en moyenne, 7 millions de journées de grève, sous le régime présent, ce n'est plus qu'un million par an. Une amélioration aussi considérable procède, évidemment, de l'expansion et de l'effort menés par l'Etat, pour que le sort de chacun bénéficie des progrès accomplis, mais aussi, la grève, bien souvent, paraît aujourd'hui, inutile, voire anachronique. Parce que le peuple français a conscience de l'importance vitale du développement de la France, et aussi parce que les travailleurs et leurs organisations prennent une part grandissante de responsabilités dans les études, les débats, les plans qui règlent, soit pour l'ensemble, soit dans chaque branche, l'activité économique de la Nation.

Si au point de vue économique, où le critère est la balance des comptes extérieurs, celle-ci n'avait jamais cessé d'être gravement déficitaire depuis la fin de la guerre jusqu'en mai 1958, au point que pour empêcher l'effondrement, on ne pouvait rien tirer des humiliantes sollicitations dont on avait usé et abusé auprès des autres Etats. Un renversement complet s'est accompli tout à coup, en 1959, 1960, 1961, il ne s'est pas passé un mois où l'étranger n'ait payé à la France, plus que celle-ci ne lui avait versé. Assurément, les lourdes mesures qui ont été prises lors de la grande opération financière, monétaire et économique que l'on sait, ont pour beaucoup contribué à ce changement de la tendance. Mais ces mesures ne valent et ne tiennent que parce que la masse des français les acceptent et les approuvent. Au total, notre pays a trouvé l'équilibre qui est la condition de tout. Quoiqu'il arrive, les moyens nécessaires seront pris pour le maintenir.

C'est pourquoi, la Nation aborde l'année nouvelle lucidement et sereinement. Non point qu'elle se dissimule les traverses qu'elle va rencontrer, mais elle entend poursuivre son oeuvre dans les conditions qu'elle a choisies et les buts qu'elle a fixés. Qu'est-ce à dire ? Voici pour l'essentiel.

Une négociation qui s'engagerait entre les grandes puissances de l'ouest, et la Russie soviétique, pour tenter de régler les problèmes du monde, notamment celui de l'Allemagne, trouverait, sans aucun doute, notre participation constructive. Mais il faudrait qu'eut cessé l'état de tension créé par les mises en demeure et les menaces du Kremlin. Il faudrait aussi qu'il s'agisse de rééquilibrer l'Europe et non point aggraver l'emprise de Moscou sur notre continent.

En Europe même, l'union de six Etats qui se dessinent dans les domaines, politique, économique, culturel, et dans celui de la défense, la France veut, pour sa part, continuer à la développer, mais de telle sorte que les intérêts de tous, qu'ils soient industriels ou qu'ils soient agricoles, y trouvent également leur compte, et que la Nation elle-même reste à l'intérieur de l'organisation commune.
En Algérie, la France entend que d'une manière ou d'une autre se terminent les conditions actuelles de l'engagement politique, économique, financier, administratif et militaire, qui la tient liée à ce pays. Et qui s'il restait ce qu'il est, ne serait être, pour elle, qu'une entreprise à hommes et à fonds perdus, alors que tant d'autres tâches appellent ses efforts ailleurs. Cependant, dès lors qu'auraient cessé les combats et les attentats, elle serait disposé à apporter sa coopération à un Etat algérien souverain et indépendant. Procédant du libre suffrage des habitants, pourvus que ses intérêts essentiels soient garantis, en échange de ce qu'elle fournirait. Actuellement encore, c'est là la solution qui lui paraît la meilleure. Parce que l'association des communautés algériennes y trouveraient sans doute sa chance. Et parce qu'il pourrait en sortir des rapports d'avenir féconds, entre elle-même d'une part, l'Algérie et l'Afrique du nord, d'autre part. Il semble, aujourd'hui, possible, que tel doive être en effet, en vertu d'un accord réciproque, l'aboutissement d'un drame cruel.

Mais dans tous les cas, l'année qui vient sera celle du regroupement en Europe, et de la modernisation de la plus grande partie de l'armée française. Dès le mois prochain, deux divisions nouvelles et certaines formations aériennes commenceront le mouvement qui les ramènera d'Algérie dans la métropole, comme celles qui viennent d'être transférées et comme d'autres qui les suivront. En même temps, un allègement de nos charges en effectif nous aideront à pourvoir à nos dépenses d'armement moderne.

Enfin, et c'est la condition suprême de son avenir, la France entend continuer l'oeuvre immense de sa rénovation intérieure, au point de vue économique, social, scolaire, scientifique, technique et démographique. Avec ardeur, elle commence la mise en oeuvre du grand plan, qui en 4 ans, peut et doit porter son peuple, à un niveau d'existence qu'il n'avait jamais atteint, ainsi qu'à une capacité, une puissance, digne de ce qu'il se doit à lui-même et de ce qu'il doit aux autres. Comme justement cet objectif répond à une grande ambition, la France sait que le travail à fournir, les obligations à accomplir sont à la mesure des résultats à obtenir, et que le progrès exige un effort discipliné.

Voilà nos buts. Ils sont clairs et ils sont tels qu'ils doivent servir à tous sans nuire à qui que ce soit. Puissent tous les peuples en faire autant.

Françaises, Français, au nom du pays, je souhaite une bonne année, à ses filles et à ses fils, c'est-à-dire : à chacune et à chacun de vous. Ces voeux vont en particulier aux petits enfants qui naîtront en 1962, et ajouteront à nos espérances. Et puis tous ensemble, nous portons vers la France, nos voeux très confiants et très ardents, de bonheur et de grandeur.

Vive la République,

vive la France. !

31 Décembre 1962

Résumé :
Charles de Gaulle présente aux Français ses voeux pour l'année 1963. S'il fait allusion aux épreuves de l'année qui vient de s'écouler, il se montre confiant pour 1963. Après avoir souhaité vie et prospérité à la jeune République algérienne, il met l'accent, pour la France, sur les thèmes de l'Europe et du progrès social et économique.
Nous achevons une année qui a dans le bon sens marqué le destin de la France. Certes, ne nous y ont manqués ni les épreuves ni les dangers. Quand commença 1962, on se tuait encore en Algérie tandis qu'attentats et complots se prolongeaient en métropole. Récemment, un démon qui nous fut jadis très familier et très malfaisant, celui des crises politiques, a cru trouver l'occasion de revenir nous tenter. Enfin, il y a deux mois, le monde passa près de la guerre.

 Mais rien n'a empêché notre pays de poursuivre sa rénovation : ayant tranché au fond l'affaire algérienne, nous sommes maintenant en paix partout ! Ce qui, en un quart de siècle, ne nous était jamais arrivé. Cette année même, nous avons solennellement confirmé nos institutions nouvelles dans lesquelles l'Etat trouve une continuité qui lui manquait désespérément depuis des générations. Grâce à l'effort national déployé sous ce régime de bon sens et d'efficacité, notre prospérité atteint un niveau que nous n'avons connu en aucun temps et notre progrès social réalise une avance sans précédent. A mesure que le couple de l'essor et de la raison nous ramène à la puissance, la France retrouve son rang, son attrait, ses moyens. Ainsi avons-nous pu, tout au long de cette année, élargir et approfondir nos relations africaines, les étendre en particulier à la république algérienne, à laquelle bien sincèrement nous souhaitons qu'elle s'organise dans l'ordre nécessaire, d'abord, à sa vie puis à sa prospérité. Ainsi avons-nous pu contribuer à mettre effectivement en route la communauté économique, fondée dans la capitale de l'Italie entre six états continentaux, offrir à ces mêmes états un début d'union politique, resserrer nos rapports avec la république d'Allemagne. Ainsi avons-nous pu renforcer notre sécurité et celle du monde libre en commençant à nous doter d'une défense nationale moderne. Je ne dirais certainement pas qu'il n'y a pas d'ombres au tableau. Tout de même, je crois que, en 1962, nous n'avons pas perdu nos peines.

Voici 1963 ! Françaises, à chacune de vous, Français, à chacun de vous, j'adresse du fond de mon coeur mes meilleurs voeux de nouvel an ! Et puis, en notre nom à tous, je forme pour la France le souhait immémorial : " Que l'année lui soit heureuse " ! A cet égard, sans doute, beaucoup de choses dépendront avant tout des événements, tout comme un navire sur la mer n'est le maître des vents ni des flots : un peuple ne peut à lui seul commander au calme ni au remous du monde. Mais, dans ce qui lui advient, pour combien comptent, en toute hypothèse, son effort et sa cohésion ? Travailler et rester unis, voilà quelles sont, quoiqu'il arrive, les meilleures de nos garanties. L'an dernier, pour notre bien, nous avons su nous les assurer. L'an prochain, qu'il en soit de même !

Pourquoi faire ? Mais, pour avancer ! Un peuple comme le nôtre ne prodigue pas son labeur, ne pratique pas la stabilité, n'aide pas à maintenir la paix simplement afin d'en rester à ce qui est acquis déjà. Le progrès est aujourd'hui notre ambition nationale.

Progrès démographique : la France moderne pourrait compter 100 millions d'habitants. Combien seront donc bienvenus les bébés qui naîtront chez nous en 1963 ! Quant à ceux de nos rapatriés qui voudront, décidément, s'installer en métropole et, nous dont comprenons très bien les soucis, parfois les chagrins, c'est de grand coeur que nous les aiderons à y trouver, comme les autres Français leur place, leurs droits et leurs devoirs.

Progrès économique, technique, scientifique, dont tout le reste dépend, qui changent à un rythme rapide, non point certes l'âme, mais la structure et la figure de la France. Notre plan règle ce développement, il nous faut l'exécuter.

Progrès social, ce qui veut dire : amélioration nouvelle de la condition de tous. D'abord, des moins favorisés et, en particulier, cette fois, des gens âgés, ainsi qu'une étape de plus vers le mieux en tout ce qui concerne la vie et la valeur de la collectivité nationale : logement, éducation, hospitalisation, équipement urbain et agricole.

Progrès international notamment dans les deux directions où s'exerce, au-dehors, notre effort principal : il s'agit d'abord de l'Union de l'Europe occidentale pour son économie, pour sa politique, pour sa défense, pour sa culture. Etablissant ainsi l'équilibre avec les Etats-Unis, renforçant de ce fait même l'alliance du monde libre, ouverte dans l'avenir à une Angleterre qui voudrait et qui pourrait se joindre à elle définitivement et sans réserve. Visant à organiser avec les pays de l'Est, dès lors que, un jour, ils en viendraient à la grande détente, la paix et la vie de notre continent tout entier. Il s'agit ensuite de l'aide que nous devons prêter aux peuples qui en ont besoin pour leur développement moderne et, avant tout, de notre coopération avec ceux des états d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine qui souhaitent celle de la France.

Ce sont là de bien grands espoirs. Oui, mais le temps est venu où, sans tomber dans l'outrecuidance, nous pouvons et nous devons regarder loin et viser haut ! Françaises, Français, nos voeux pour la nouvelle année sont à la mesure de la France nouvelle.

Vive la République !

Vive la France !


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